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Nouvelles Causeries japonaises – Le mythe de l’égalité

Nouvelles Causeries japonaises

XVIII – Le mythe de l’égalité

À Hiyoshi

Si nous nous arrêtons quelques instants sur les fondements du régime décadent dans lequel nous vivons, personne ne manquera de remarquer la stupidité coupable des soi-disant valeurs sans cesse agitées sur la place publique avec des simagrées sataniques visant à faire taire toute réflexion et toute intelligence humaines. La situation en serait comique si elle ne provoquait des maux douloureux au plus profond des êtres, encrassant la vue et mettant des bâtons dans les roues de notre accomplissement en tant qu’hommes.

L’égalité est effectivement la plus grande arnaque des deux derniers siècles. Il suffit de se pencher sur le sens du mot lui-même pour réaliser la régression opérée depuis la Révulsion française. Que signifie en effet « égalité » ? Ce terme est si dévoyé qu’il représente habituellement une sorte de mot de passe [1], de patte blanche, permettant de justifier les pires horreurs. Avant, nous avions comme critères la vérité ou la bonté ; aujourd’hui c’est l’égalité. Chose extraordinaire : personne sur la place publique ne semble vraiment savoir ce que signifie ce substantif. Tout le monde l’utilise. Il suffit de le prononcer pour être déchargé de tout ou pour rendre les armes, sans penser plus profondément. Ce poison doucereux de l’assoupissement collectif et de la mollesse encouragée et complaisante nous manipule autant qu’il nous rend coupables d’inaction, d’abandon et d’indifférence.

J’étais moi-même endormi. Même si je n’aimais pas l’égalité, instinctivement, je ne savais dire pourquoi. La langue japonaise put encore une fois donner un coup de pouce à l’intelligence endormie et me faire prendre conscience de la stupidité coupable de l’emploi de ce mot : « égalité ». Il se trouve qu’en japonais, le mot « égalité » tel quel est importé de l’anglais, et ne s’emploie qu’en mathématiques… ! Les autres mots peu ou prou équivalents en japonais signifient soit « équité », soit « égalité » mais dans un sens religieux, devant l’au-delà. Une égalité étrangement thomiste, en Somme

La langue française ne pardonne pas l’emploi qu’il est fait d’un terme. Pourquoi utiliser l’horrible « égalité » plutôt que la juste « équité » ? Le choix de l’un pour l’autre n’est pas un hasard et dévoile la volonté planifiée de créer un homme nouveau. Depuis la Révulsion jusqu’au communisme, au marxisme et à toutes les pensées démoniaques dont nous avons la manifestation sous nos yeux chaque jour ; toutes ces folies ont pour point commun de supprimer Dieu, de supprimer le sacré et de faire de l’homme un « dieu » nouveau. Par ce péché d’hybris, le sacré détruit laisse la place au profane sacralisé, et l’égalité de notre nature humaine face à la mort laisse la place à l’égalité profane, c’est-à-dire dire à l’égalité mathématique appliquée à toutes les réalités… Que faire de moins charnel ?

L’égalité ne peut être qu’une égalité mathématique. Le mot ne signifie rien d’autre que cela. Nous sommes loin de l’équité aristotélicienne ! Si l’on dit que deux choses sont égales, quelles que soient les protestations des bonnes consciences se défendant de toute malignité, le cerveau français ne peut qu’associer cette opération au concept mathématique : l’identité absolue, le fait d’être un, la mêmeté. Avec des chiffres ou avec autre chose, la signification est claire. Dire que deux choses sont égales, c’est dire que deux choses sont identiques.

Or, il est évident qu’il n’y a pas deux hommes sur la Terre qui soient identiques. Il n’existe pas, par conséquent, deux hommes égaux sur Terre, par nature. Il n’y a jamais eu de discussions sur le sujet, et les anciens s’évertuaient simplement à chercher la justice et la vérité sur Terre et dans le Ciel. Ils cherchaient simplement ce qui était commun mais ne prétendaient certainement pas nier le fait de l’inégalité naturelle des hommes entre eux.

Les illuminés à lier ont pourtant décrété que l’homme était égal à tout autre homme. Erreur fondamentale, démesure coupable et vice profond. Et que l’on n’aille point me dire que l’on peut parler, évidemment, d’égalité sociale ou politique. Il nous suffit de nous représenter le matraquage hystérique tendant à faire avaler à nos enfants qu’homme et femme sont, en fait, identiques, et donc que l’on peut se choisir entre les deux… Voilà l’homme qui se croit dieu dans toute son horreur hubristique !

La péché est, de fait, bien pire que le mensonge. En fondant la société sur une contre-vérité désincarnée, tout coule irrémédiablement vers l’atteinte d’un but matériel : la création impossible de cette égalité ici-bas. Autrement dit, la création de l’homme nouveau. Or, cela est impossible, puisque contre-nature, d’où l’émergence des totalitarismes. Si l’on ne peut pas changer la nature, l’homme peut du moins s’obséder diaboliquement à croire vrai l’impossible et à forcer par tous les moyens ses congénères à croire et à agir contre la nature… Les dégâts de ces comportements sont incalculables : il suffit de contempler l’état de délabrement spirituel et les tristes hères qui hantent l’ici-bas, atomisés, divisés et comme ensorcelés par des vessies que l’on nous fait prendre pour des lanternes.

La seule justice réelle existe dans la mort, devant le Ciel. Là, tout le monde se retrouve dans la même situation ; mais cela n’a rien à voir avec une quelconque égalité entre homme. La seule égalité est face à la mort et à l’au-delà. Hors cela, l’homme s’efforce de rechercher la vérité, sans jamais pouvoir l’atteindre complètement, et de réaliser le bien, sans jamais y parvenir parfaitement, en suivant la justice qu’il ne peut connaître que par les moyens limités de ses forces (limitées), dont la valeur concrète subséquente est l’équité.

L’égalité n’est pas une valeur. C’est un simple concept mathématique qui, sorti de son domaine, est aussi aride et vide que la carcasse désincarnée de la Raie Publique, qui ne peut combler son vide qu’en dévorant et qu’en détruisant le plein d’énergies spirituelles qui subsistent chez les hommes encore hommes

— Paul-Raymond du Lac
Pour Dieu, Pour le Roi, Pour la France

[1N’insistons pas sur une drôle d’homonymie : chacun sait ce qu’est une « passe »… !

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