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Il est des noms dont le simple murmure peut provoquer l’effroi, la crainte, le respect ou même la défiance. Bakounine appartient à cette catégorie bien qu’on ne sache pas bien pourquoi car peu de personnes ont eu un de ses livres entre les mains. Sa grande postérité dans le mouvement intellectuel anarchiste doit pourtant beaucoup à ses ouvrages même s’il fut aussi un homme d’action. C’est sans doute l’action violente des anarchistes, justifiée par les théories anarchistes de Proudhon et de Bakounine, qui a fait beaucoup pour le mythe bakouninien. Sa biographie laisse apparaître un homme d’action plutôt qu’un pur intellectuel. Fils d’aristocrates russes d’origine hongroise, Bakounine (1814-1876) aura passé le plus clair de son temps en Europe à essayer de faire advenir ses idées. À l’occasion de ses pérégrinations, il a notamment rencontré Proudhon et Marx.
L’anthropologie de Bakounine nous ramène à un animal féroce qui a su se civiliser. De l’esclavage animal, l’homme est passé à l’esclavage religieux. Le primitif attribue sa force à une volonté extérieure puis finit par en faire le principe de toute chose. Mikhaïl Bakounine en déduit que l’homme devient nécessairement l’esclave de Dieu. La domination religieuse provient selon lui de l’ignorance du peuple alors qu’elle n’est pas fondée scientifiquement. En bon rationaliste, l’anarchiste russe attend une démonstration mathématique de l’existence de Dieu alors que le débat ne se situe pas dans le domaine de la science mais dans celui de la métaphysique. Bakounine va même jusqu’à défendre la position du Diable qu’il voit comme un libre-penseur ne voulant plus être soumis à une autorité illégitime. Il partage avec Proudhon le sens de la formule et la mauvaise foi drolatique. Le but de l’humanité est d’aller vers l’avant, de ne jamais regarder en arrière. La finalité suprême de cet évolutionnisme progressiste consiste en la libération de toutes les chaînes du passé qu’elles soient animales, religieuses ou politiques. En effet, dans la vision de Mikhaïl Bakounine, c’est par ignorance que l’homme se laisse dominer par l’État qui n’est décrit que comme source d’oppression.
La réalisation de cette liberté passe par l’organisation anarchiste : « Je reçois et je donne, telle est la vie humaine. Chacun est dirigeant et chacun est dirigé à son tour. Donc il n’y a point d’autorité fixe et constante, mais un échange continu d’autorité et de subordination mutuelles, passagères et surtout volontaires. » [1] Aucune autorité fixe et constante n’est reconnue. La seule autorité qui vaille est celle de la science mais pas celle des savants. Bakounine résume sa position ainsi :
« En un mot, nous repoussons toute législation, toute autorité et toute influence privilégiée, patentée, officielle et légale, même sortie du suffrage universel, convaincus qu’elle ne pourrait tourner jamais qu’au profit d’une minorité dominante et exploitante, contre les intérêts de l’immense majorité asservie. Voilà dans quel sens nous sommes réellement des anarchistes. » [2]
L’auteur russe n’est pour autant pas un scientiste pur jus. La science permet uniquement de penser la réalité mais ne reflète pas la réalité en tant que telle car elle n’est pas en capacité de saisir le réel. C’est pourquoi, il faut se méfier des hommes de science qui prétendent édicter au nom de la science comment il convient de vivre.
Célèbre livre de combat, Dieu et L’État n’en demeure pas décevant. Beaucoup moins dialectique et profond que l’équivalent marxiste Manifeste du Parti communiste, l’ouvrage de Mikhaïl Bakounine avance beaucoup d’éléments sans démonstration logique. Il s’apparente plutôt à un brûlot bien écrit mais dépourvu d’un plan cohérent. Fer de lance de l’anarchisme russe, Bakounine n’emporte pas l’adhésion avec sa synthèse anarchiste.
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