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« Si vous étiez du monde, le monde aimerait son bien ; mais parce que vous n’êtes pas du monde, puisque mon choix vous a tirés du monde, pour cette raison, le monde vous hait » [1]. Être chrétien, c’est résister. Mais il faut nous garder d’avoir l’œil fixé sur le duel français d’un combat universel, qui n’est lui-même qu’une bataille dans la guerre que mène Lucifer contre l’homme, souhaitant, à travers lui, atteindre Dieu. Nous ne luttons pas contre le mariage homosexuel, contre François Hollande, ou même contre des lobbies gays. Nous luttons contre le monde. Plus précisément, le monde lutte contre nous.
Le monde est « le système érigé par notre péché collectif, le rassemblement de tous nos faux ego pour se récompenser ou se détruire. Mettez tous les hypocrites dans un bureau, un club ou une église, et vous obtiendrez ce que l’Église entend par « monde ». » [2]. Si nous voulons lutter contre le monde, nous devons lutter d’abord contre nous-mêmes. Nous devons nous convertir. A l’instar de Marx et Trotski, l’Église Catholique propose une révolution permanente de l’homme. Le catholique doit perpétuellement se convertir. Cette conversion éternelle est néanmoins le résultat d’un acte personnelle d’humilité fondamentalement libre. Que chacun réfléchisse sur sa propre vie. Nous devons nous reconnaître pécheurs. Par tous nos péchés – orgueil, acédie [3], colère, envie, avarice, gourmandise, luxure – nous avons fait bien pire que les actes homosexuels que nous réprouvons. Nos péchés sont d’autant plus graves que nous avons la grâce d’être éclairé par notre foi et le magistère, et qu’ils constituent un contre-témoignage [4]. Si nous nous reconnaissons humblement pécheurs, nous savons aussi que Dieu est infiniment miséricordieux (si ce n’était pas le cas, le monde aurait déjà été détruit). Nous croyons fermement que si nous avons la contrition de nos péchés, Dieu nous pardonne à travers le sacrement de la confession.
Le pardon donné par le Christ nous permet de dépasser notre péché. Sachant que nous sommes pécheurs, nous ne nous taisons pas pour autant. En revanche, l’expérience de l’amour du Christ, vécu dans la confession, nous permet d’exercer un regard de compassion sur les autres pécheurs. C’est la devise du pape François : miserando at eligando, ce qui signifie « prenant pitié et choisissant ». C’est le regard du Christ, et c’est le regard que nous sommes invités à avoir. Nous devons apprendre à avoir un regard de miséricorde afin d’évangéliser notre prochain. Nous devons apprendre à compatir, à souffrir avec. C’est encore l’invitation du pape François lors de son homélie à Lampedusa : « Nous sommes une société qui a oublié l’expérience des pleurs, du « souffrir avec » : la mondialisation de l’indifférence nous a ôté la capacité de pleurer ! […] Demandons au Seigneur la grâce de pleurer sur notre indifférence » [5]. Tel est le véritable combat. Stopper les atteintes à la famille et mettre un terme à la culture de mort n’est pas la véritable révolution qui nous est demandé. Ces combats ne sont pas le fond du sujet. Plus profondément, nous devons apprendre à aimer en vérité. C’est cette conversion qui nous est demandée, c’est cette conversion qui convertira nos frères.
Le véritable drame de la France contemporaine n’est pas ce système du désir désordonné, ou cette culture de mort. Ce ne sont là que les symptômes barbares d’un mal-être plus profond. Le véritable drame de la France contemporaine est sa déchristianisation. Dès lors, lutter pour le changement des institutions sera un combat vain sans une reconquête spirituelle des cœurs.
Pourquoi le mariage entre deux personnes de même sexe a été revendiqué ? Nous pouvons y discerner deux raisons. Premièrement, le mariage n’est plus perçu comme l’acte de fondation d’une famille. Une partie importante des Français (et même des Occidentaux) considère que le mariage est simplement l’union de deux personnes qui s’aiment. Dans la mesure où deux hommes, ou deux femmes, peuvent s’aimer, il n’y a donc aucune raison à ce qu’ils, ou elles, ne puissent pas se marier. Le refuser créerait une inégalité. L’une des conséquences de cette conception du mariage est que, lorsque l’amour – ou plutôt le sentiment amoureux – vient à disparaître, le mariage perd rapidement sa raison d’être, et le couple divorce.
Ce qui nous amène à la deuxième raison de la revendication d’un mariage homosexuel : la multiplication des divorces. L’argument le plus pertinent des défenseurs de la loi Taubira était de dire que, sans mariage, les enfants éduqués par un couple de même sexe ne bénéficient pas d’une protection juridique adéquate [6]. Dans la mesure où tous les couple de même sexe sont dans l’incapacité biologique de procréer, comment se fait-il que des enfants se retrouvent dans ces cellules familiales ? Ces familles sont nécessairement le résultat de divorces, ou d’enfants conçus hors-mariage. Dès lors, la solution pour éviter qu’un enfant puisse être privé d’un père ou d’une mère est de restaurer le mariage, en rendant le divorce et/ou le remariage plus difficile.
Si le mariage est un acte d’amour, l’amour est bien plus qu’un simple sentiment. L’amour ne cesse pas avec le sentiment amoureux. L’amour est un choix libre, volontaire et quotidien. Nous ne décidons pas de tomber amoureux. En revanche, nous pouvons vouloir, ou ne pas vouloir, aimer quelqu’un, comme un époux aime son épouse, et comme une épouse aime son époux. L’amour est fait pour être éternelle. Il est un don total et absolu de la personne. Dès lors, la possibilité du divorce et du remariage est une absurdité. Comment est-il possible de se donner totalement et absolument à une personne, tout en se ménageant une faculté de retrait ? C’est ce que disait déjà Jean-Paul II en 2002 : « Si le mariage n’est pas pour la vie, ce n’est pas un mariage, et sans le mariage, le fondement même de la société, la famille, est miné » [7].
Mais là encore, gardons-nous bien d’une réponse uniquement institutionnel. De même que la lutte contre le SIDA ne se gagnera jamais en utilisant comme seule arme le préservatif, de même la lutte pour la famille ne se gagnera jamais en utilisant comme seule arme le Droit. Dans ces deux combats, la solution passe nécessairement par une conversion morale. Il s’agit dans le deux cas d’apprendre à aimer en vérité, avec fidélité.
Nous marcherons sur deux jambes. D’une part, nous devons militer pour une justice plus harmonieuse. Cela ne se restreint pas aux questions de société. Il s’agit véritablement de restaurer le concept de politique : la recherche du bien commun dans la cité. Nous, chrétiens, devons cesser de nous battre seulement sur les questions de société.
D’autre part, nous devons évangéliser la France, et l’Europe. Le combat fondamental, essentiel, est d’ailleurs là : notre conversion, et la conversion du monde. Désobéir au monde, c’est aimer son prochain. « Aimez vos ennemis et priez pour vos persécuteurs » [8]. La stratégie du démon est la condamnation que l’intelligentsia a porté sur la manif pour tous : la haine. Le monde nous hait et veut faire croire que nous haïssons. Nous devons, au contraire, par tous les moyens, témoigner de notre amour, pour témoigner de l’amour de Dieu, qui s’est fait homme, est mort et ressuscité par amour de nous.
[1] Saint Jean, XV 19
[3] Mieux connu sous le nom de paresse, l’acédie est une tristesse qui ne supporte plus le bien divin, ou un dégoût de l’action. Elle se reconnaît à l’impatience, l’instabilité, la dispersion et la diversion, les remises en question abusives et le goût démesuré pour la détente.
[4] « Je ne crains qu’une chose, les mauvais chrétiens » Sainte Bernadette
[5] Homélie du 8 juillet 2013 à Lampedusa, à lire absolument
[6] Ce qui n’est pas entièrement vrai, mais il reste que ces enfants n’étaient pas suffisamment protégés. Le fait que le couple s’en occupant puisse être responsable de cette situation ne change rien à la nécessité de cette protection juridique pour les enfants.
[7] Discours au Tribunal de la Rote romaine, le 28 janvier 2002
[8] Saint Matthieu, V 44
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