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Le Christ est venu pour nous rendre libres : il nous a offert par sa Croix le Salut qui délivre du péché. C’est ainsi que le Fils de Dieu sans fard que la Vérité nous rendrait libres (Jean VIII, 32). Cette parole contient de grands mystères ; c’est dire que le Christ nous délivrera de tout ce qui fait de nous des hommes :
« Mais de quoi la vérité nous délivrera-t-elle, si ce n’est de la mort, de la corruption, du changement ? car la vérité demeure immortelle, incorruptible, immuable, et la véritable immutabilité, c’est l’éternité elle-même [1]. »
La liberté mystique nous est offerte mais elle n’est pas donnée : en réalité, elle se conquiert. Le royaume des cieux est emporté de force, et les violents s’en emparent (Matthieu XI, 12). Fruit de la Rédemption en Christ et effusion de l’Esprit Saint, cette liberté peut se perdre précipitamment. Le retour de l’âme à la servitude est une nouvelle chute que nous expérimentons quotidiennement [2].
Or que voyons-nous aujourd’hui ? Une société fière de sa propre décrépitude, faisant l’apologie du vice, et n’engendrant ainsi qu’un peuple esclave de tout ce que le monde peut proposer en matière de désir et de passion. L’homme moderne, qui s’enorgueillit si bien de sa "liberté" politique, gloriole bien misérable, est en réalité l’être le plus avili et le plus asservi. Et comment pourrait-il en être autrement ? Assailli partout par des tentations malsaines, accablé de toutes parts par les esprits mauvais, l’homme perd peu à peu sa liberté et, abandonné aux voluptés, rejoint les hordes dociles et résignées de l’hédonisme triomphant. Il n’est pas ici question de parler plus avant des conséquences sociales engendrées par l’ultra-libéralisme marchand : d’excellents analyses ont été produites sur la question [3]. Car cet esclavage spirituel est le plus dur de tous, et seul Dieu peut nous en libérer [4]. Nous voulons donc ici parler de la libération mystique, c’est-à-dire la libération de l’esprit [5], telle que nous l’enseigne la divine Doctrine catholique.
Nous nous proposons ici de hiérarchiser les différentes étapes qui conduisent à la délivrance complète du Chrétien. Car en réalité, le sommet de la sagesse consiste à imiter le Christ, ultime et parfait modèle. Or le Christ est Roi, Saint et Dieu. C’est là trois degré de libération que nous voulons traiter point par point, car il n’y a qu’un seul Salut et qu’un seul Dieu, mais pour conduire l’homme à son achèvement, il y a des préceptes multiples, et nombreux sont les degrés qui l’élèvent jusqu’à Dieu [6].
La première étape consiste à devenir un roi. Par leur baptême, les Chrétiens participent en effet à la fonction royale du Christ [7] et réalisent cette dignité en vivant conformément la Foi chrétienne. Le Christ est en effet Roi par la souveraineté suprême qu’il possède sur la Création : le Chrétien peut, par analogie, conquérir la souveraineté sur son corps.
« De tous les régénérés dans le Christ le signe de la Croix fait des rois, l’onction du Saint-Esprit les consacre comme prêtres, afin que, mis à part le service particulier de notre ministère, tous les chrétiens spirituels et usant de leur raison se reconnaissent membres de cette race royale et participants de la fonction sacerdotale. Qu’y a-t-il, en effet, d’aussi royal pour une âme que de gouverner son corps dans la soumission à Dieu ? [8] »
Par la maîtrise de soi et le combat spirituel, le Chrétien peut conquérir cette liberté royale [9] qui l’arrache à l’empire du péché et lui fait vaincre les esprits du mal qui sèment en lui la corruption et le chaos. Ainsi, réduisant le corps en servitude [10], le Chrétien règne sur lui-même et se libère des puissances du monde :
« Celui qui soumet son propre corps et régit son âme, sans se laisser submerger par les passions est son propre maître : il peut être appelé roi parce qu’il est capable de régir sa propre personne ; il est libre et indépendant et ne se laisse captiver par un esclavage coupable. [11] »
Mais si le roi conquiert la liberté de son royaume, c’est aussi pour en conserver ensuite la paix ; c’était là la première fonction traditionnelle du roi et la première demande de ses sujets : préserver la paix, maintenir la concorde, assurer la justice. Chef de guerre, le roi est aussi le gardien de la paix et en cela châtie celui qui l’enfreint et sème la dissension ; c’est pourquoi, aucune libération mystique ne peut se faire sans une pacification inspirée par la Paix du Christ, qui est l’état dernier du sage qui a vaincu les ennemis de sa chair.
« Ceux qui sont pacifiques sont ceux qui règlent tous les mouvements de leur âme, les soumettent à la raison, tiennent sous le joug toutes les passions indomptées de la chair, et deviennent ainsi le royaume de Dieu. » [12]
Nous savons qu’un roi est toujours appelé à lutter contre les ennemis de l’intérieur et de l’extérieur qui menacent de faire retomber son royaume dans l’état premier de troubles et de discordes dans lequel il était ; écoutons donc l’avertissement de Saint Paul :
« Dans la liberté par laquelle le Christ nous a affranchis, tenez ferme, et ne vous laissez pas mettre de nouveau sous le joug de la servitude. [13] »
Si la première étape de la libération consiste principalement à lutter contre la chair, et pouvait donc se faire de manière naturelle, c’est-à-dire philosophique [14], la seconde étape fait directement intervenir la grâce qui se communique par l’Esprit Saint et nécessite une œuvre surnaturelle qui est la justification [15]. Le Chrétien se libère en purifiant son cœur, en se détournant du péché, qui est éloignement de Dieu, pour se tourner vers la source de toute vie [16] : il manifeste alors avec splendeur les vertus théologales. Le Chrétien se sanctifie donc en même temps qu’il se justifie, jusqu’à se soumettre complètement à la volonté divine. C’est ainsi qu’après s’être rendu roi de son corps, le chrétien fait de Dieu le Roi de son âme [17]. Le Chrétien se libère donc une seconde fois en faisant complètement la volonté de Dieu [18] : d’homme charnel qu’il était, il devient alors homme spirituel [19]. Saint Paul nous dit ainsi (Romains VI, 19-22) :
« Si vous avez jadis offert vos membres comme esclaves à l’impureté et au désordre de manière à vous désordonner, offrez-les de même aujourd’hui à la justice pour vous sanctifier. Aujourd’hui, libérés du péché et asservis à Dieu, vous fructifiez pour la sainteté, et l’aboutissement, c’est la vie éternelle » [20].
Cette œuvre de Dieu est à ce point excellente que Saint Augustin n’hésite pas à dire que la justification de l’impie surpasse en grandeur et en puissance la Création de la Terre et du Ciel [21]. Parole sublime qui affirme avec force la différence ontologique existante entre le sensible et l’intelligible : le monde, aussi vaste et complexe soit-il, est encore un amas sophistiqué de matière, appartenant en son entier au périssable ; l’âme, de nature intelligible, touche au divin par son activité même : sa conversion, son retour à Dieu, exige plus donc d’effort que n’importe quelle création indéfinie de matière.
L’étape ultime et dernier degré de la libération se trouve dans l’union de l’homme en Dieu et la dissolution complète de son être dans l’Être. Il s’agit de participer de la nature divine du Verbe (II Pierre I, 4), comme le demandait saint Pierre et d’être ainsi divinisé [22], déifié [23]. Car le Verbe s’est sacrifié pour nous racheter, s’est abaissé pour nous élever, s’est fait chair pour nous rendre esprit, s’est fait Homme pour nous faire Dieu [24]. C’est ce mystère sublime qui fit de l’Incarnation le début d’une ère nouvelle : celle de la Grâce et de Dieu fait homme, et l’homme fait Dieu [25].
Précisons dès maintenant, pour ceux qui seraient effrayés par une mystique hétérodoxe ou en tout cas trop téméraire vis-à-vis du dogme : il ne s’agit pas de dire que l’homme peut être véritablement Dieu, mais qu’il peut s’en rendre semblable - et s’y perdre. Cette doctrine fut assumée et développée par les plus grands Docteurs catholiques et aux premiers desquels saint Irénée, saint Augustin [26] et saint Bernard qui n’eurent pas peur de décrire avec une audacieuse acuité la réalité de cette transformation de l’homme que rendait possible la nouveauté de l’Incarnation. Écoutons la parole précieuse de saint Irénée, cet évêque de Lyon qui lutta toute sa vie contre l’hérésie gnostique :
« Car Dieu a voulu que sa Progéniture, le Verbe premier-né, descende vers la créature, c’est-à-dire vers l’ouvrage modelé, et soit saisie par elle, et que la créature à son tour saisisse le Verbe et monte vers lui, dépassant ainsi les anges et devenant à l’image et à la ressemblance de Dieu. [27] »
C’est encore ce que soutient le très-scolastique Saint Thomas :
« Le Fils unique de Dieu, voulant que nous participions à sa divinité, assuma notre nature, afin que Lui, fait homme, fit les hommes Dieu » [28].
C’est enfin la pensée de Maître Eckhart qui appelait à « déshabiter » le corps et à anéantir la volonté : l’âme doit être nue, vide. C’est à ce prix que Dieu y établit son règne et que le Christ y est engendré en permanence.
L’homme qui est ainsi transporté au-delà de toute lumière habite dans l’unité. C’est pourquoi saint Paul dit : « Dieu habite une lumière vers laquelle il n’est pas d’accès », qui est en soi un Un pur. Et c’est pour cela que l’homme doit être tué et complètement mort, ne plus rien être en lui-même, soustrait à toute ressemblance et ne plus être semblable à personne : c’est alors seulement qu’il est vraiment semblable à Dieu [29].
Dans la tradition de l’apophatisme dionysien et de la théologie négative, Maître Eckhart estime que seul l’inconnaissance est capable de « tuer l’homme », condition pour s’unir au « néant divin », autre nom de la Déité ou, chez Denys, de la Ténèbre [30]. Car il y a dans l’âme un « fond sans fond » insondable où seul Dieu se trouve :
Je l’ai déjà dit souvent aussi : il est dans l’âme une puissance qui n’est touchée ni par le temps, ni par la chair, qui émane de l’esprit et reste dans l’esprit et est absolument spirituelle. Dans cette puissance, Dieu se trouve totalement, il y verdoie et fleurit dans toute la joie et toute la gloire qu’il est en lui-même. Cette joie est tellement du cœur, elle est d’une grandeur si inconcevable, que nul ne saurait l’exprimer pleinement avec des mots. Car le Père éternel engendre sans cesse son Fils éternel dans cette puissance, en sorte que cette puissance collabore à l’engendrement du Fils et d’elle-même en tant que ce Fils, dans l’unique puissance du Père [31].
Par cette « cime de l’âme », étincelle divine, il est possible d’abolir la distinction entre le moi et le Soi divin. Il est possible de dire « Je » avec Dieu [32] : « Dieu doit absolument devenir moi, et moi absolument devenir Dieu, si totalement un que ce « lui » et ce « moi » deviennent et soient un et que dans l’étance ils opèrent éternellement une [seule] œuvre [33]. »
Mais ce sont les Pères grecs qui, influencés directement par la métaphysique orientale, développèrent avec systématisme et profondeur la doctrine de la divinisation de l’homme ou theosis. Se fondant sur une parole évangélique de saint Jean [34], les Pères grecs exprimèrent cette doctrine de l’union à Dieu comme seule capable de délivrer les hommes de la mort et du péché [35]. Défiant toute entreprise rationnelle et explosant avec force les limites de la connaissance, Grégoire de Nysse, saint catholique [36], nous explique comment seul un acte surnaturel de la Grâce peut réellement déifier l’homme :
« Les saints deviennent ce qui ne peut jamais appartenir en propre à la puissance naturelle, puisque la nature ne possède aucune faculté capable de percevoir ce qui dépasse la nature. Aucun aspect de la déification n’est, en effet, le produit de la nature, puisque la nature ne peut comprendre Dieu. Seule la grâce divine possède en propre la faculté de communiquer la déification aux êtres, d’une manière analogique ; alors la nature resplendit d’une lumière surnaturelle et se trouve transportée au-dessus de ses propres limites par une surabondance de gloire [37] ».
Transporté par une expérience [38] toute extatique, l’homme déifié comprend que le premier secret de la connaissance de Dieu, c’est de savoir qu’il est inconnaissable : là est l’extase mystique qui ravit à l’âme, dissoute en Dieu, la certitude de sa propre existence. Alors l’âme est affranchie de tout, libérée de sa condition, car annihilée en Dieu.
« Tu seras surélevé par la voie de l’inconnaissance jusqu’à ne plus faire qu’un avec Celui qui est au-delà de toute essence et de toute connaissance. En effet, c’est par la sortie de toi-même et de tout, - extase totale et irrésistible - que tu seras emporté vers la Suressentielle splendeur de la Ténèbre divine, étant affranchi et dépouillé de tout. » [39].
Qui convaincra alors l’homme déifié de pécher ? Que lui feront encore les tentations, les afflictions, les angoisses ? Ne croyons pas que cet homme-là ne vit plus et qu’il feint d’exister : il est en réalité le seul à être véritablement en vie. Perdu au milieu d’hommes déjà morts en ce qu’ils se tuent dans le péché, lui seul vit réellement, car il est impossible de vivre sans la vie, et il n’y a de vie que par la participation à Dieu [40] . L’homme s’anéantit en Dieu pour commencer à vivre, et dès lors, sa vision se clarifie (II Corinthiens V, 6.), il perçoit les choses dans leur réalité divine. Atteint ce degré, il est alors complètement libéré, et peut alors s’écrier avec saint Bernard :
« Ô pur et saint Amour ! Ô douce et sainte affection ! Ô soumission de l’âme entière et désintéressée ! D’autant plus entière et plus désintéressée qu’elle est exempte de tout retour sur elle-même, d’autant plus tendre et plus douce que tout ce que l’âme éprouve alors est divin. En arriver là, c’est être déifié. De même qu’une petite goutte d’eau mêlée à une grande quantité de vin semble disparaître en prenant le goût et la couleur de ce liquide ; de même encore que, dans la fournaise où il est plongé, le fer semble perdre sa nature et se changer en feu ; ou bien comme l’air pénétré par les rayons du soleil se change en lumière et semble plutôt éclairer qu’être éclairé lui-même : ainsi en est-il chez les saints de tous leurs sentiments humains ; il semble qu’ils se fondent et s’écoulent dans la volonté de Dieu. Autrement s’il restait encore quelque chose de l’homme dans l’homme, comment se pourrait-il que Dieu fût tout en tous ? Sans doute, la nature humaine ne se dissoudra pas ; mais elle sera autrement belle, autrement glorieuse et puissante [41] ».
[1] Saint Augustin, De la Trinité, 4, 18.
[2] « Tout homme, en effet, qui se laisse dominer par un désir coupable, abaisse et plie la liberté de son âme sous le joug de la servitude ; nous résistons à cette servitude, lorsque nous luttons contre l’iniquité qui veut nous dominer, lorsque nous résistons énergiquement à la tyrannie de l’habitude, lorsque nous détruisons en nous le crime par le repentir, lorsque nous lavons dans nos larmes les souillures de nos fautes. » Saint Grégoire, 4 Moralia, 21 et 42.
[3] Le Bonheur paradoxal de G. Lipovetsky en fait partie : une analyse de la société marchande, brillante pour les sociologues, désolante pour les Catholiques.
[4] « Le Christ se borne à leur montrer qu’ils sont sous l’esclavage du péché, esclavage le plus dur de tous, et dont Dieu seul peut délivrer. » Saint Jean Chrysostome, Homélie 53.
[5] « Vous serez libres, non point du joug des barbares, mais des chaînes du démon, non point de la captivité du corps, mais de l’iniquité de l’âme. » Saint Augustin, Sermon 48 sur les paroles du Seigneur.
[6] Saint Irénée de Lyon, Adversus Haereses, IV, 9, 3.
[7] CEC 786
[8] Saint Léon le Grand, Sermon 4, 1 ; Patrologie Latine 54, 149
[9] CEC 908
[10] Je meurtris mon corps au contraire et le traîne en esclavage, de peur qu’après avoir servi de héraut pour les autres, je ne sois moi-même disqualifié. Corinthiens 9, 27. Cf. Saint Augustin, Du Combat chrétien, Chap. VI, « Châtier son corps pour vaincre Satan et le monde. »
[11] Saint Ambroise, Psal. 118, 14, 30 ; Patrologie Latine 15, 1403A
[12] Saint Augustin, Serm. sur la mont. liv. 1,chap. 2, in Catena Aurea, Saint Thomas. Chap.5, 9.
[13] Galates 5, 1.
[14] Cet appel à la domination de l’esprit sur le corps est en effet un enseignement classique de la philosophie morale antique. Le Phédon de Platon est peut-être ce qui s’est fait de plus beau en la matière. Les Stoïciens reprendront à leur compte ces préceptes sages ; ils seront eux-mêmes une grande source d’inspiration pour les Pères : « Exerce-toi à mourir. » C’est me dire : exerce-toi à être libre. Qui sait mourir ne sait plus être esclave : il s’établit au-dessus, du moins en dehors de tout despotisme. Que lui font le cachot, les gardes, les verrous ? Il a toujours la porte libre. Une seule chaîne, nous tient à l’attache : l’amour de la vie. Sans rejeter bien loin cette passion, il convient de la réduire ». Lettres à Lucilius, Livre troisième, 10, Lettre 26, Paris, Les Belles Lettres, 2007, p.41.
[15] La justification comporte donc la rémission des péchés, la sanctification et la rénovation de l’homme intérieur. Cc. Trente : DS 1528. Le terme de justification doit être compris dans le sens d’une « augmentation de la justice » chez le Chrétien, la justice étant la « rectitude de l’amour divin » (CEC 1991).
[16] CEC 1989
[17] « La partie supérieure dans l’homme, c’est-à-dire l’âme et la raison, est elle-même soumise à un être plus élevé, qui est la vérité et le Fils de Dieu. Nous ne pouvons « commander à ce qui est au-dessous de nous, à moins d’être soumis à ce qui est au-dessus. Telle est la paix promise sur cette terre aux hommes de bonne volonté (Lc 2, 14). » Saint Augustin, Serm. sur la mont. liv. 1, chap. 2 in Catena Aurea, Saint Thomas. Chap.5, 9.
[18] Cf. Saint Augustin, Du combat spirituel, Chap. VII, « Pour que notre corps nous soit soumis, il faut se soumettre à Dieu »
[19] I Corinthiens 1, 14-15. « Mais l’homme naturel ne reçoit pas les choses de l’Esprit de Dieu, car elles sont une folie pour lui, et il ne peut les connaître, parce que c’est par l’Esprit qu’on en juge. L’homme spirituel, au contraire, juge de tout, et il n’est lui-même jugé par personne. »
[20] Rm 6, 19. 22
[21] CEC 1994 « S. Augustin estime que " la justification de l’impie est une œuvre plus grande que la création du ciel et de la terre ", parce que " le ciel et la terre passeront tandis que le salut et la justification des élus demeureront " (ev. Jo. 72, 3). Il estime même que la justification des pécheurs l’emporte sur la création des anges dans la justice en ce qu’elle témoigne d’une plus grande miséricorde. »
[22] La notion de « divinisation de l’homme » est propre à la théologie orthodoxe, développée notamment par Grégoire Palamas, mais le processus de « déification » qui y est décrite n’est pas étrangère à la théologie latine et catholique. Dans les faits, la « divinisation » est l’équivalent couramment employé par les Orthodoxes pour parler de la « sanctification ».
[23] Le thème de la fusion en Dieu est présent dans de nombreuses traditions religieuses, notamment en Islam, avec l’exemple célèbre du soufi Mansur al-Hallaj, mystique mis à mort pour avoir dit publiquement : « Ana al haqq (Je suis Dieu) ».
[24] Car le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu. Saint Athanase, inc. 54, 3 ; Patrologie Grecque 25, 192B.
[25] Ecoute maintenant : je vais te dire les mystères redoutables d’un Dieu double, et qui sont arrivés à moi comme à un homme double. Il a pris ma chair et il m’a donné son esprit et je suis devenu moi aussi dieu par la grâce divine, fils de Dieu mais par adoption, ô dignité ! ô gloire ! Syméon le Nouveau Théologien, Hymnes (25), Le Cerf, 1971.
[26] Augustinus Hipponensis, Enarrationes in Psalmos (C.S), In Psalmum XLIX Enarratio, Sermo ad plebem Patrologie Latine, Col.1050C. Enarrationes in Psalmos (C,G,S), In Psalmum CXVII Enarratio, Sermo ad Populum.
[27] Saint Irénée de Lyon, Contre les hérésies, V, 36, 3.
[28] Saint Thomas d’Aquin, opusc. 57 in festo Corp. Chr. 1.
[29] Maître Eckhart, Traités et sermons, GF (éd. A. de Libera), Sermon n°29, p. 332.
[30] « L’âme meurt d’une mort totale dans la merveille de la Déité, parce qu’elle ne peut comprendre la nature divine. Elle se précipite dans le néant et devient néant. Dans ce non-être (niht sînde) elle est ensevelie et par l’inconnaissance elle est unie à l’inconnu, et avec la non-pensée (ungedanken) elle est unie au non-pensé (ungedachte) et par le non-amour elle est unie dans le non-aimé […] Lorsque l’âme est tuée dans les trois Personnes, elle perd son néant et est jeté dans la Déité. Là elle découvre le visage du néant divin. » Maître Eckhart, Pf. P. 536, 28-537.
[31] Maître Eckhart, Sermon n°2, « Il est dans l’âme un château fort », p. 233. « C’est le lieu de la naissance divine où Dieu prononce son Verbe. Ce fond, par nature, ne peut rien recevoir, en effet, que le seul être divin, sans aucun intermédiaire. Dieu est là dans l’âme comme tout et non comme partie : il pénètre dans le fond : nul ne touche le fond de l’âme sinon Dieu même. » Maître Eckhart, Pf. P. 4, 37-5, 5.
[32] Le thème de la fusion en Dieu est présent dans de nombreuses traditions religieuses, notamment en Islam, avec l’exemple célèbre du soufi Mansur al-Hallaj, mystique mis à mort pour avoir dit publiquement : « Ana al haqq (Je suis Dieu) ».
[33] Maître Eckhart, Pr. 83, ibid., p. 447, 5-6. Il s’agit là de ce qu’on appelle plus communément la « non-dualité » : « Lorsque je fluais de Dieu, toutes choses dirent : Dieu est, et cela ne peut pas me rendre heureux car par là je me reconnais créature. Mais dans la percée où je suis libéré de ma propre volonté et de la volonté de Dieu et de toutes ses œuvres et Dieu lui-même, je suis au-dessus de toutes les créatures et je ne suis ni Dieu ni créature, mais bien plutôt ce que j’étais et ce que je dois rester maintenant et à jamais. […] En effet, le don que je reçois dans cette percée, c’est que moi et Dieu nous sommes un. Alors je suis ce que j’étais et là je ne grandis ni ne diminue, car je suis là une cause immuable qui meut toutes choses. » Pr. 52, DW 2, p. 502, 4-505, 6. AH 2, p. 148-149.
[34] Jean 17, 22-23. Pour que tous ils soient un, comme vous, mon Père, vous êtes en moi, et moi en vous, pour que, eux aussi, ils soient un en nous, afin que le monde croie que vous m’avez envoyé. Et je leur ai donné la gloire que vous m’avez donnée, afin qu’ils soient un, comme nous sommes un, moi en eux, et vous en moi.
[35] Jean Meyendorff, Saint Grégoire Palamas et la mystique orthodoxe, Paris, Point Seuil, 2002, p. 33.
[36] Saint Grégoire de Nysse, magnus episcopus, fut régulièrement commenté par les papes, de saint Agathon (Epistola Prima ad Augustos Imperatores, Patrologie Latine, Vol. 87, Col.1189A) à Benoit XVI (http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2007/documents/hf_ben-xvi_aud_20070829_fr.html)
[37] Grégoire de Nysse, A Thalassius, 22, Patrologie grecque, XC, 321 A. "L’homme, image de Dieu, devient Dieu par la déification, il jouit pleinement de l’abandon de tout ce qui lui appartient par nature (...), parce que la grâce de l’Esprit triomphe en lui et parce que Dieu seul, manifestement, agit en lui ; ainsi, Dieu et ceux qui sont dignes de Dieu n’ont plus en toutes choses qu’une seule et même activité ("énergie") ; ou plutôt, cette énergie commune est l’énergie de Dieu seul, puisque tout entier il se communique à ceux qui, tout entiers, en sont dignes (Ambigua, Patrologie grecque, XCI, 1076 BC.
[38] Dès le XIVe siècle, il était courant de parler de « connaissance expérimentale de Dieu » pour parler de la contemplation et de la mystique, ce dernier terme n’ayant été forgé qu’au XVIIe siècle. C’était notamment le cas du Chancelier de l’Université de Paris, Jean de Gerson, auteur de la Montagne de la Contemplation.
[39] Denys l’Aréopagite, Traité de la théologie mystique, Traduit du grec par L’abbé Darboy, 1845, I. « Ce qu’est la divine ténèbre »
[40] Saint Irénée de Lyon, Contre les Hérésies, IV, 20, 5.
[41] Traité de l’Amour de Dieu, Chapitre X, 28 ; Patrologie Latine 991A. O amor sanctus et castus ! o dulcis et suavis affectio ! o pura et defaecata intentio voluntatis ! eo certe defaecatior et purior, quo in ea de proprio nil jam admistum relinquitur : eo suavior et dulcior, quo totum divinum est quod sentitur. Sic affici, deificari est.
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