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En février 1817, Stendhal arrive à Florence, l’esprit rempli d’attentes. Il a voyagé plusieurs mois dans le nord de la péninsule italienne et il entre désormais dans les entrailles de la Toscane, la région qui concentre un tiers des richesses artistiques mondiales. En arrivant à Florence, ce sont ses rêves qu’il entrevoit. « Avant-hier, en descendant l’Apennin pour arriver à Florence, mon cœur battait avec force. Quel enfantillage ! ». Lui, le soldat de la campagne d’Italie napoléonienne, l’écrivain, le poète qui a fait de ce pays son grand et unique amour a en vue le lieu qu’il a tant désiré.
Entré dans la ville le souffle court et les jambes tremblantes, il se précipite sur le premier florentin venu pour entendre son parler, son accent, et pose des questions dont il se moque des réponses, pour le seul plaisir de les poser. Arrivé dans l’église Santa Croce, il parvient à se fait ouvrir une petite chapelle. Alors qu’il est seul sous les fresques, la magie opère.
« J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les beaux-arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de cœur ; la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber. »
C’est de cet épisode que le « syndrome de Stendhal » tire son nom.
Mais l’écrivain grenoblois eût-il été écrivain au XXIe siècle, aurait-il vécu la même chose ?
Je ne le crois pas. Non pas que Florence soit moins belle, mais Florence souffre d’un autre problème. Chaque année, la ville est littéralement envahie par des millions de touristes. Pressé par des touristes chinois, abasourdi de cliquetis d’appareils photos, Stendhal n’aurait pas pu être si touché parla beauté florentine. Je pense pour ma part que Stendhal serait revenu de Florence la mine basse, déçu. Qu’est-ce qui a changé ? Le nombre, l’intensité, l’efficacité, le charme – ou plutôt sa disparition –, la mathématisation du voyage, c’est tout cela qui a été amplifié, jusqu’à déchirer ce qu’avait lancé le Grand Tour des aristocrates anglais du XVIIIe siècle.
La révolution industrielle a tout atteint, le voyage y compris. Le développement du tourisme, comme extension du domaine du marché aux beautés et intérêts patrimoniaux des lieux visités, détruit-elle précisément son objet ?
A partir des XVIe et XVIIe siècles, ce sont les Anglais, peut-être pour compenser leur isolement géographique, qui lancent les premiers mouvements touristiques. Ils se rendent de plus en plus nombreux en Italie puis sur l’ensemble du continent. Peu à peu, le voyage anglais gagne la réputation de « former la jeunesse », ébauchant déjà ce qui deviendra « the Grand Tour ».
En effet, à l’heure où l’aristocratie française ne vit que pour être à Versailles, en Angleterre, se développe un véritable phénomène social, une « mode », celle de voyager à travers l’Europe à vingt-cinq ans, un âge sans responsabilité, mais un âge auquel la tête est bien remplie de connaissances fraîches. C’est avant tout un voyage éducatif. John Locke conseillait ainsi à ses compatriotes d’effectuer deux voyages éducatifs, avec notamment pour but d’apprendre le français.
Il fallait apprendre et avoir appris. On ne partait en Grand Tour qu’après avoir lu, après avoir appris le français, le latin, voire l’italien et le grec. Et une fois sur place, l’objectif était clair : le jeune aristocrate anglais serait ensuite « tout à l’observation des mœurs, des manières et des idées des autres pays car le principal but du voyage, c’est d’acquérir la connaissance de ce qui ne peut être connu autrement ».
Le Grand Tour anglais était un véritable voyage, à visée initiatique. Le voyage est en effet l’occasion de sortir d’un environnement familier et d’y connaitre des difficultés. Ne pas y parler sa langue maternelle, ne pas avoir ses amis, ses repères, voilà aussi ce que cherchaient ces jeunes Anglais.
Le voyage répond à un besoin humain anthropologique. Le voyage initiatique est ainsi une pratique sociale particulièrement répandue dans les sociétés humaines.
Le premier voyage européen est celui qui ramène le roi d’Ithaque, Ulysse, de Troie à son île natale. Pour faire ce qui prendrait aujourd’hui trois jours à un bateau de croisière, il met dix ans. Il traverse des tempêtes, rencontre des dieux, des mages, des traîtres. Le voyage d’Ulysse a un but mais ce sont les épreuves qu’il traverse qui en font un véritable voyage. Une fois rentré à Ithaque et son trône récupéré, Ulysse ne vit plus grand-chose d’intéressant à conter dans un livre, l’épopée est terminée, il peut reposer.
Le voyage possède en lui une part de mystère, de danger. Avant d’atteindre la récompense de la destination, il faut relever des défis, des épreuves, affronter la mort en face, et la battre. Le voyage est une inspiration poétique, une occasion d’analyse politique, sociologique, une occasion de comprendre mieux le monde, de parfaire son art et sa connaissance en apprenant des pratiques des terres lointaines. Quel cruel manque à la science politique si Tocqueville n’avait pu faire son voyage en Amérique !
Le Grand Tour anglais s’est pourtant dévoyé. Il portait déjà en lui les germes du tourisme de masse : on peut pour cela relire les témoignages sur la terrible réputation que s’étaient acquis les jeunes Anglais, buveurs et ignares, dans les villes qui les recevaient.
Naturellement, porter en germe le dévoiement n’est pas être responsable du dévoiement. Le voyage tel que le Grand Tour l’a proposé à une époque n’était pas mauvais en soi, c’est tout un simplement une question de degré, de taille, de ce voyage !
Il y a quelques temps, j’ai reçu le témoignage d’une touriste à Florence en plein mois de juillet. Revenue de son voyage, je la questionnais sur l’impression que la belle Toscane lui a faite. Outre la chaleur certaine qui avait dû l’accabler, naturellement, la beauté de la ville lui avait plu. Le Palais de la Seigneurie, la Galerie des Offices, je voulais tout savoir. Et le Ponte Vecchio, qui enjambe l’Arno ? « Nous n’y sommes pas allés, on ne pouvait pas y accéder ». Voilà le problème. On pourrait refaire l’expérience avec Venise, Rome ou Barcelone. Comme une application du principe de Pareto, une minorité des endroits les plus beaux attirent une écrasante majorité des touristes, et des touristes toujours plus nombreux.
Et les chiffres le prouvent. Selon la Banque Mondiale, en l’an 2000, les touristes sur terre étaient 689 millions. Ils étaient 1 milliard et 400 millions en 2018. On peut donc grossièrement estimer qu’il y avait deux fois moins de touristes sur le Ponte Vecchio il y a seulement 20 ans. Pas sûr que ce ne soit pas déjà trop pour l’admirer.
Naturellement, cette courbe haussière a une courbe sœur de la croissance économique. En l’an 2000, l’industrie du tourisme pesait 536 milliards de dollars dans le monde. En 2016, ce chiffre monte à 1360 milliards.Cette somme représenterait 10% du PIB mondial. C’est précisément cette évolution et ce poids dans l’économie mondiale qui ont fait dire à Laurent Fabius, Ministre des affaires étrangères, que « le tourisme, c’est une mine d’or ». Et il a raison, le tourisme est véritablement une mine d’or qui se réduit de plus en plus à une simple activité économique, une industrie de divertissement.
Le Grand Tour anglais se mathématise, se rationalise, il n’est plus un voyage mais une activité de divertissement.
Le capitalisme a pour principe cœur la mathématisation du monde. Le monde capitaliste fonctionne parfaitement sur la raison, uniquement sur la raison. C’est un modèle théorique, hors réel, qui fonctionne en dessin sur une feuille blanche, mais qui ne prend pas en compte les sentiments, les émotions, il les balaye comme étant non-rationnels. Le capitalisme est le système qui, étendu sur un terrain accidenté, aplatit l’ensemble et en fait une plaine bien plate. Chaque talus, chaque caillou qui dépasse est une tradition, une loi, une habitude non productive : ces cailloux doivent tous être aplatis, fondus dans le sol. Que ce sol soit partout identique, il rentrera ainsi parfaitement dans un modèle théorique.
La dimension hors réel du capitalisme pose parfois des difficultés dans son application : il suppose l’absence de l’idée de limite comme le serait par exemple l’environnement dans lequel nous vivons, la finitude des ressources naturelles.
Autres éléments que le capitalisme ne peut prendre en compte car non-intelligibles, ce sont les émotions et les sentiments. Ces sentiments existent pour des gens et des choses. Les humains éprouvent des sentiments entre eux ou pour des idées. Ils éprouvent des sentiments pour des habitudes, pour un type d’architecture, pour un accent particulier, on aime ses enfants et on aime se balader sur un sentier particulier le dimanche après-midi. Ces éléments culturels se délitent à hauteur de l’application du modèle mathématique de développement.
Le développement touristique en application : le Marais
Cette vision chiffrée du monde trouve son application sur le tourisme avec le fameux développement touristique préconisé par tous les économistes libéraux.
Le Marais est devenu l’ancien quartier de Paris officiellement transformé en attraction touristique, en espace marchandisé : le temps passé dans le Marais a une valeur particulièrement élevée en euros. C’est le quartier dont les magasins sont ouverts le dimanche depuis dix ans. C’est le quartier du shopping, de la mode. La semaine, des jeunes filles immensément grandes et immensément maigres déambulent entre deux rendez-vous de défilé. Le weekend, il faut prendre son élan pour sortir de son immeuble. Happés immédiatement par une foule naviguant de vitrine en vitrine, à contre-courant du métro suivant l’heure d’ouverture des magasins.
Aujourd’hui, les habitants du Marais à Paris fuient leur quartier lorsque, la nuit venue, ils veulent prendre des verres. À part les quelques survivants de la rue de Rivoli, ils ont migré vers Bastille, vers Châtelet. Le Marais la nuit, c’est une attraction éteinte, la journée est terminée, on enlève les clés du contact. Pas une lumière dans les immeubles.
Les 1er, 2e, 3e et 4e arrondissements de Paris seront bientôt regroupés en un seul arrondissement, faute d’habitants. Quartier de la noblesse à la Renaissance, quartier populaire depuis la révolution industrielle, le Marais est la caricature de la ville Disneyland. Les hôtels particuliers se sont tous vidés de leurs nobles habitants, remplacés par des boutiques de luxe. En marchant dans la rue, le Français non-averti se fait alpaguer dans la rue par les vendeurs de ces boutiques de luxe, mais en leur répondant en français, il se heurte à un problème : il n’y a plus besoin de parler français pour être embauché dans un magasin du Marais. C’est tout le sens des nouvelles appellations des zones internationales de shopping décidées par le Ministre Macron. Ce n’est plus la France, c’est une zone internationale. Chers concitoyens, il faut se faire à l’idée. L’idée d’une nation, c’est un droit qui s’applique certes, mais par extension, ce sont toutes les coutumes, les habitudes de vie, les langues et leurs accents. Le Marais est une zone internationale, sans nation, sans vie locale, il n’y a plus de coutume, ni même de langue vernaculaire.
Marcher dans son quartier quand on habite le Marais, c’est se faire bousculer par des hordes de gens qui n’osent pas dire « pardon » parce qu’ils ne parlent pas la langue, ils ne connaissent pas les codes ; dit-on pardon quand on bouscule quelqu’un en France ? Marcher dans le Marais, c’est beaucoup marcher dans le Marais, pour aller chercher son pain. Il y avait trois boulangeries rue des Francs Bourgeois. Aujourd’hui, il y a trois devantures de boulangeries, avec des vêtements de luxe à l’intérieur. Le tourisme n’est pas le seul responsable, mais il fait sa part. En demandant un café, on s’entend répondre en anglais. En engageant la conversation avec ses voisins de terrasse, on s’entend répondre en portugais, en chinois, en arabe, souvent dans un anglais approximatif, très rarement dans notre propre langue.
Ce développement touristique est partie intégrante du paradigme actuel. Dans l’esprit de beaucoup de conseillers économiques de pays en développement, le tourisme est une arme indispensable. Certaines économies se tournent entièrement vers lui, notamment des économies insulaires, comme s’il était sans effet et potentiellement sans fin.
Le problème est clair, il y a trop de touristes dans le monde. Pour contrer cette massification du tourisme, chacun doit aux autres d’avoir le courage de réfléchir en profondeur à son voyage.
Aristocratique/démocratique
Il existe finalement deux types de touristes.
Le touriste démocratique et le touriste aristocratique. Le touriste de la masse et le touriste de l’exception.
Le touriste de la masse voyage pour son divertissement. Le touriste de l’exception voyage pour grandir et il sait qu’il est une nuisance à ceux qui restent, il se fait donc discret, il respecte les lieux et les gens qu’il rencontre.
Le touriste aristocrate met dix ans avant d’aller en Italie. Il en a appris la langue, étudié la culture, il a rêvé de l’Italie, il a pensé à l’Italie, il en a même pleuré avant de venir. Arrivé en Italie, il se retrouve en face d’un compatriote qui ne regarde même pas ce qu’il prend en photo.
Les huit commandements de l’aristocrate du tourisme :
N’est pas aristocrate du tourisme qui veut, ou plutôt, il faut vraiment le vouloir pour le devenir. Il s’astreint à huit règles exigeantes mais qui font sa fierté et surtout son bonheur. Les voici.
C’est une question de principe. L’aristocrate du tourisme vit mieux les voyages en prenant le temps de profiter tranquillement des lieux. Il se souvient qu’au Moyen-Âge, des guides allemands conseillaient aux voyageurs de séjourner une saison à Paris, une autre à Tours et les deux restantes dans le Midi. Le voyage prend le temps.
A cause des billets d’avions et des offres d’hébergement désormais bon marché, les touristes américains restent désormais un à deux jours à Paris puis une journée à Venise, une journée à Rome. Ils goutent le plus possible à chaque stand de chocolat puis repartent. Le voyageur supérieur marche lentement dans les vieilles rues de Milan. Il discute avec les commerçants, il prend son temps pour apprécier les paysages et n’hésite pas à faire un musée en deux, voire trois fois.
Visiter un pays dont on ne parle pas la langue, d’abord c’est passer pour un bleu. C’est le meilleur moyen d’attirer les voleurs et escrocs en tous genres. Mais visiter un pays dont on ne parle pas la langue, c’est également obliger les habitants de ce pays à se conformer à nous alors que, chez eux, ils ont le droit le plus élémentaire de vivre en toute tranquillité. Les habitants de ce pays ne profitent que peu du tourisme, incommensurablement peu en comparaison des professionnels du tourisme.
Et visiter un pays sans en parler la langue, c’est passer comme un fantôme dans la société que l’on visite, on en voit l’ombre mais il est insaisissable. Les habitants du pays visité ne peuvent pas agir comme ils en ont l’habitude. Par sa connaissance de la langue locale, l’aristocrate du tourisme assis sur un banc de la Plaza Mayor de Madrid ne laisse pas un vieil habitant du quartier faire une remarque en l’air : il lui répond dans sa langue.
Ce commandement paraît bien plus contraignant qu’il n’est vraiment. Il n’est aucunement nécessaire de parler couramment la langue du pays en question. Mais il est indispensable d’être capable de prononcer au moins la vingtaine de phrases basiques de communication.
En effet, rien de plus ridicule qu’un groupe de touristes. Un voyage de classe, un car de chinois ou une croisière sont les ennemis les plus mortels des diversités des cultures. En voyageant en groupe, ces touristes forment une microsociété au sein de la plus grande société dans laquelle ils arrivent ; une micro-culture déplacée au sein d’une plus grande société, qui a transformé celle-ci en gruyère. Un local ne peut appréhender un groupe entier, et les rapports que chacun aura avec la société locale sont donc extrêmement réduits. Un voyage de groupe est une occasion de transporter sa vie sociale dans un autre espace, souvent un espace en décalage complet avec notre vie sociale. Un voyage de classe c’est bien plus l’occasion de discuter avec ses camarades que d’en apprendre sur une culture étrangère.
Ainsi, les rêveries du promeneur solitaire qu’était Jean-Jacques Rousseau ne se font qu’en parfaite solitude.
Partir de Paris le matin et arriver au Caire quelques heures plus tard est un choc, tant pour le touriste que pour les accueillants. Pour apprécier véritablement une nouvelle culture, une nouvelle architecture, une nouvelle façon de faire, il faut y arriver progressivement. Faire des étapes est indispensable ! L’avion, en ce qu’il téléporte littéralement ses passagers d’un endroit à l’autre du globe, fait exactement le contraire. Il importe de choisir un moyen de transport qui respecte l’esprit du Voyage.
C’est exigeant. On n’entre pas dans une maison comme dans un moulin. On y entre dans les règles de l’art : c’est-à-dire invités par un membre de la maison. C’est la même chose pour le voyage. On entre dans un pays uniquement si on y connait quelqu’un qui y habite à temps plein. Une attache sédentaire dans un pays, même un compatriote qui se serait installé pour quelques mois, permet déjà de mieux comprendre la culture dans laquelle on se rend.
Connaitre quelqu’un, c’est être à l’aise pour apprendre les façons de faire du lieu, c’est profiter de son coup d’œil, de sa connaissance. Encore une fois, l’exigence permet de mieux profiter de son voyage.
Lors de la préparation du voyage, l’aristocrate touristique s’est renseigné sur la façon de s’habiller locale, la façon de se comporter dans la rue, au restaurant. Étant mis au courant des us et coutumes des lieux qu’il visite, il sait que lorsqu’il entre dans une boulangerie française, il doit dire bonjour à toute la clientèle. En Iran, la touriste occidentale met le voile.
Idéalement, l’Organisation mondiale du Tourisme, ou les États, pourrait éditer un indispensable du touriste distribué dans tous les avions, en attendant des tests obligatoires au départ de chaque destination.
Il n’y a aucune raison que des touristes, ceux qui ne tirent rien des lieux où ils vont, gâchent le plaisir des authentiques voyageurs. Ceux qui voyagent pour en écrire des romans, pour en former une vision du monde et la transmettre à la société dans son ensemble. Ceux-là doivent avoir la priorité pour la simple raison qu’ils veulent profondément tirer quelque chose de leur voyage et le font effectivement.
Lorsque le pot de fer propose à son voisin, le pot de terre, de partir en vadrouille, le pot de terre ne tient pas deux minutes avant d’éclater en morceau, trop fragile disent-ils… En entrant en contact avec ceux qui l’accueillent dans ses voyages, le touriste aristocrate peut partager sa propre culture, sa propre expérience, il peut comparer ce qu’il voit à ce qu’il connait et en compléter sa vision du monde, relativiser les lieux qu’il traverse et ceux qu’il connait. Le roseau trop frêle ne devrait pas se risquer à sortir au vent.
L’échelle humaine, c’est celle à laquelle notre corps et notre esprit sont le mieux adaptées. L’Histoire, la biologie et la spiritualité nous l’apprennent, tout n’est pas relatif à l’humain, il existe de l’absolu. Vivre au milieu d’une ville hyper-dense de 20 millions d’habitants n’a pas les mêmes incidences sur notre corps et notre esprit que vivre dans un village de 200 âmes. Tout comme partir en voyage entouré de hordes de touristes n’est pas la même expérience que visiter un jardin caché avec un local.
Dans le monde idéal que je voudrais esquisser, les Hommes ont tous une culture propre, ils vivent en communautés de quelques millions de personnes au maximum sur un territoire donné. Chaque région a un parler particulier, des comportements particuliers. Des endroits paradisiaques sont connus des initiés uniquement. Les centres névralgiques ont retrouvé une échelle humaine.
Dans un monde qui a retrouvé le sens du local, le cœur de Paris, l’Ile de la Cité, est réinvesti par ses habitants car, avec moins d’hôtels et moins de logements de location saisonnière, les prix de l’immobilier ont diminué drastiquement.
Les voyageurs que l’on croise dans Florence sont moins nombreux, ils parlent tous un peu l’italien, ils prennent des notes sur leurs visites, ils admirent ce qu’ils voient, se renseignent dessus et reviennent chez eux, quelques mois plus tard, hypnotisés pour de bon par la beauté qu’ils y ont vue.
Dans ce monde idéal, les commerçants ont appris à ajouter le bien-être et le calme dans la colonne « actifs » de leurs comptes.
Chaque communauté humaine vit sans être scrutée, vue, singée ; elle est respectée dans le principe de son existence, le principe de son existence indépendante. Dans le fond, c’est cela le progrès du genre humain, le surpassement de la violence intégrale, le cheminement vers le beau, l’agréable. Oui, des communautés peuvent coexister dans un espace donné sans se livrer à la violence, et si elles ne le peuvent pas aujourd’hui, elles le pourront un jour.
Nous n’atteindrons jamais ce monde idéal évidemment, mais nous pouvons nous en rapprocher. Car voilà la note finale de cet article : les hommes se rendent compte du manque de sens. Je suis optimiste, tout le monde peut l’être.
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