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Entre dissidence et ultramontanisme

12 novembre 2011 Tancrède ,

Tribune libre de Tancrède pour Nouvelles de France. Ce portail libéral-conservateur donne la parole à toutes les droites françaises.

Extraits

La suite, sur Nouvelles de France.

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Sur la vigilance nécessaire des catholiques

La pièce de Roméo Castellucci, Sur le concept du visage du fils de Dieu, exaspéra les divergences latentes entre les « tradis » et les « moderneux », c’est-à-dire entre ceux, d’une part, pour qui l’ambiguïté du message trahissait les intentions perfides de l’auteur (la meilleure arme du diable n’est-elle pas de faire croire qu’il n’existe pas ?) et ceux, d’autre part, qui, pour tout un tas de raisons, ont prétendu « mieux comprendre » la pièce en y voyant un quelconque message caché ou subtil… qui n’existe pas.
Disons-le tout de suite, ces derniers sont tombés dans le panneau de la libre interprétation personnelle, un peu comme des protestants lisant la Bible, c’est-à-dire en fonction de ce qu’ils veulent y trouver selon leurs intérêts du moment, ou, s’ils sont naïfs, à cause de leur crédulité. Plus soupçonneux en revanche sont, et plus lucides, ceux qui ont vu que cette pièce avait quelque chose de salaud et de malsain puisqu’elle a visiblement changé de contenu au cours de ses diverses représentations et varié en fonction de l’actualité (tantôt c’est la scène des enfants lapidant le visage du Christ qui est supprimée, tantôt ce sont les effluves de matière fécale qui le sont). Une pièce donc volontairement obscure, susceptible de mille interprétations personnelles et par conséquent de désaccords tout aussi nombreux.

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Sur les interférences entre les catholiques ou le message brouillé

L’abbé Grosjean et Christine Boutin sont les produits typiques d’un christianisme vague et concupiscent, démocratique et laïque, docile et lénifiant, voire relativiste et libéral ; bref, ils flirtent avec l’hérésie moderniste brocardée par les papes depuis au moins Pie IX et ne prennent la parole que pour dénoncer la fierté, l’ardeur, le militantisme et l’amour de la vérité d’une jeunesse, d’une communauté et d’un clergé résolument catholiques. Les uns rampent dans le silence, tout vautrés qu’ils sont dans la compromission avec le monde moderne libéral, financier, amoral, immoral, avorteur, inhumain, athée ; les autres refusent de se laisser glisser sur cette pente, par charité, par amour, par esprit de sacrifice.

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Sur les faux arguments avancés

Torchez-vous avec le drapeau tricolore ou le drapeau d’Israël (...) Et dans ce cas que se passe-t-il ? Vous verrez les mêmes qui nous disent « fanatisés », les Boutin, les Grosjean, les Delanoë, les Mitterrand, s’offusquer immédiatement de l’affront, et, que je sache, aucun média, personne n’ira les traiter de « sans-culottes intégristes », de « fondamentalistes laïcs », de « républicains obscurantistes », de « démocrates embrigadés », de « franc-maçons fanatiques ». Alors de grâce, les lois de la République, épargnez-les nous, et laissez-nous plutôt obéir aux Lois de Dieu.

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Au sujet de l’obsession de certains de se distinguer intégralement des musulmans. J’imagine qu’il doit y avoir là-dessous quelque sionisme chrétien. Mais je ne comprends pas l’argument. Si les musulmans marchent, comme nous, sur leurs pieds, devrions-nous changer de démarche de peur d’être assimilés à eux ? Il y a là un raisonnement qui pue le protestantisme et qui a pour logique finale la dissolution insensible des religions dans la superstructure oppressive de la laïcité. Je renverrais donc à l’excellent Joseph de Maistre qui disait dans Sur le protestantisme : « Le mahométisme, le paganisme même auraient fait politiquement moins de mal, s’ils s’étaient substitués au christianisme avec leur espèce de dogmes et de foi. Car ce sont des religions, et le protestantisme n’en est point une. »

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Sur l’art : défense de l’éthique et de l’esthétique

Ces jeunes catholiques de tradition, contrairement à ce qui a souvent été dit, ne sont pas des béotiens insensibles à toute forme d’art. Au contraire, ils se font une trop haute opinion de l’art pour accepter qu’on en appelle à ce noble terme pour parler de la pièce de Castellucci ou de la photo de Serrano. Les catholiques connaissent la richesse que le canon, avec sa batterie de règles strictes, est susceptible d’engendrer, un canon simultanément castrateur et séminal ; dans les limites définies par les grandes Poétiques, l’artiste est invité à se transcender pour dire quelque chose avec les formes pour le dire. Cette impression de carcan libère paradoxalement les forces les plus vivaces de la liberté.

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Le statut de l’art a changé. Nous datons cette rupture du milieu du XIXe siècle. La logique mercantile avait alors commencé à contaminer le domaine de l’art, réputé inestimable. Cette contamination est parallèle au triomphe de la bourgeoisie et à la marchandisation du monde : toutes les réalités, jusqu’aux réalités sacrées, devinrent des valeurs marchandes, comme les arts — a priori irréductibles à une valeur monétaire — ou comme les hommes traités en animaux de trait par l’industrialisation en marche.
C’est dans ce contexte que l’art reçut une valeur nouvelle — marchande — qui se substitua à sa valeur éternelle — esthétique et éthique — ; cette sécularisation de l’art — la culture est désormais un marché — a aussi pour conséquence de faire entrer la notion de « progrès » dans l’art. On s’imagine l’art sur un plan d’équivalence avec la science : l’art d’aujourd’hui dépasserait l’art d’hier.
Ces trois « artistes (sic) contemporains » que sont Andres Serrano, Romeo Castellucci et Rodrigo Garcia, sans aucun talent artistique et à des années-lumières de nos vrais génies, savent pertinemment que la mort les emportant n’épargnera pas non plus leur nom et leurs œuvres, condamnés à périr et à brûler avec eux dans l’oubli le plus total et la solitude éternelle de leurs cris. Pas sûr non plus qu’ils conquièrent en enfer une quelconque notoriété.
Ils ont du moins su, ici-bas, organiser leur renommée en faisant éclater le scandale ; renommée évidemment volatile : ils ont peut-être une actualité aujourd’hui, une clientèle bobo prête à les enrichir, demain ils seront plus vieux qu’Homère et plus inconnus qu’un pécore mort dans l’indifférence d’une épidémie.

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Castellucci fait partie de ces « artistes contemporains » (paradoxe) partisans du « nouveau à tout prix », car il sait qu’en imitateur il ne fera jamais mieux que tous ceux qui l’ont précédé. Pas d’Antigone nouvelle en vue, ni de Moderne Alcibiade. Alors du nouveau. Mais comme tout a déjà été dit, il ne reste plus qu’à aller tourner dans la croupe de l’humanité son bâton de metteur en scène pour en faire sortir un maximum d’immondices. La merde, c’est le prix de l’originalité, et ça fait parler. Voilà la nouveauté de l’artiste contemporain. Et le bobo de s’extasier et d’en redemander. Le bobo tient du coprophage quand il « parle art ».

L’article in extenso, sur Nouvelles de France.

12 novembre 2011 Tancrède ,

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