L’infolettre du R&N revient bientôt dans vos électroboîtes.
À mes enfants et à leur mère…
1
Il est bien tard déjà et la nuit va tomber
Avant de m’endormir, avant de succomber,
J’examine mon cœur et je songe à ma vie,
Aux êtres rencontrés, à la route suivie,
Au peu que j’ai donné, à ce que j’ai reçu,
À mes folles passions, à mon amour déçu.
Et je veux vous chanter - je ne peux plus le taire -
Qu’en dépit des amours, la voie est solitaire,
Que nos yeux sont bandés, que nous vivons grimés,
Que nos désirs sont vains et nos élans brimés !
Et vous tous mes voisins, mes prochains dans la meute,
C’est vous que j’apostrophe et c’est vous que j’ameute !
Nos mains pourraient s’unir et nos cœurs converger !
Un jardin seulement, un modeste verger,
Autant qu’un continent, trop souvent nous sépare !
La Foi nous fait défaut, le temps nous accapare,
Nous vivons sans nous voir dans la même cité,
Mais nous ignorons tout de notre cécité !
Alors que nous errons, sans amour, sans lumière,
Le ciel est notre toit, la terre notre chaumière !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
2
Et vous mes vieux amis, nous nous donnions la main,
Riant de l’avenir et sûrs du lendemain,
Nous pensions cheminer le long des mêmes routes
Faisant fi des défauts et ignorant les doutes,
Partageant notre pain, soumis au même sort,
Convaincus de chercher toujours le même port.
Nous étions des enfants, des naïfs, des novices,
Pleins de beaux idéaux et préservés des vices.
Nos regards étaient purs et nos verbes touchants,
Ne sachant rien encor de nos mauvais penchants,
Ignorant le réel et croyant aux chimères,
Trop jeunes pour savoir nos jours si éphémères,
Si pauvres nos amours, si légers nos serments,
Si prompts nos volte-face et nos égarements !
Ils sont loin maintenant, ces chemins de l’enfance,
Nous savons désormais mesurer la distance,
Imposer nos jalons le plus courtoisement,
Nous quitter sans regret au premier croisement,
Voir l’ami tel qu’il est avec le temps qui passe,
Le laisser sans remords s’engager dans l’impasse !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
3
Vous mes belles amies, j’ai valsé dans vos bras,
À ce beau bal masqué, à ce grand mardi-gras,
Nous nous cherchions, je crois , dans ces fêtes fantasques… ?
Nos yeux se sont croisés, un instant, sous les masques,
Nos mains se sont touchées au travers de nos gants,
Mais nous étions trop fiers et bien trop élégants
Pour nous abandonner et jeter nos costumes.
Se mettre à nu, ce n’était pas dans nos coutumes.
Avec vous j’ai dansé un tango sensuel,
Nous étions bien d’accord, c’était consensuel :
Deux pas vifs en avant et un autre en arrière,
Chacun à son élan, chacun à sa barrière,
Nous croyant arrivés, restant sur le départ,
Enlacés tendrement nous n’allions nulle part.
Avec vous j’ai dansé des salsas incertaines.
Serrées tout contre moi, vous étiez si lointaines !
Nous avons cru souvent du doigt toucher le ciel,
Mais ce paradis-là était artificiel !
Nous avons tous perdu à cette loterie !
Mes belles, ce n’était que vaine rêverie !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
4
Et vous mes chers parents, qui m’avez tout donné,
Tout enseigné, tout retransmis, tout pardonné,
Vous qui m’avez appris, l’honneur et la droiture,
La valeur du devoir, le prix de la culture,
Vous mes parents, mes vrais amis, mes bienfaiteurs,
Je reste à tout jamais votre grand débiteur.
Comme un très riche legs, un peu mon droit d’aînesse,
Je garde au fond du cœur les joies de ma jeunesse,
Les souvenirs radieux de l’enfance au foyer,
Avec ma jeune sœur et vous pour nous choyer !
Je n’oublierai jamais les goûters, les tartines,
Nos ébats et nos jeux, nos chansons enfantines,
Nos sanglots et nos cris, nos devoirs, nos leçons,
Ces jours où je n’étais qu’un tout petit garçon !
Après vos longues vies de labeur, de courage,
Vous nous avez quittés pour d’autres pâturages.
Vous goûtez maintenant au bonheur éternel
Dans les bras du Bon Dieu, dans son Cœur Paternel !
Et je sais que là-haut vos deux âmes ravies
Continuent jusqu’au bout de veiller sur nos vies !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
5
Et toi mon âme-sœur que par un jour de mai
J’avais pris par la main pour ne quitter jamais,
Toi que j’ai reconnue – Adam dans la Genèse –
Avec ton joli corps et tes yeux Véronèse,
Tes tresses relevées d’un beau blond vénitien,
Toi qui sortais tout droit d’un tableau du Titien
– Ou de mon cœur ouvert de cette plaie intime ? –
Toi qui es devenue ma Femme légitime,
Toi, la chair de ma chair, toi, le sang de mon sang,
Quand tu m’es apparue dans le monde naissant
Après ce long sommeil suivant ma solitude,
Je t’ai donné mon nom ; et pleins de gratitude
Nous avons échangé nos anneaux à l’autel
Devant Dieu qui voulait cet Amour immortel !
Mais moi je n’ai pas su te garder de tes songes !
Comme au jardin d’Eden, il séduit le mensonge !
Et nous avons goûté à l’arbre du Savoir,
Le seul fruit défendu, le fruit qui nous fait voir
Le Bien et tout le Mal, nos cœurs nus et avides.
Que sans Dieu, sans Amour, nos vies sont toutes vides !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
6
Et vous mes chers enfants, la vraie joie de mes jours,
Je suis sur vos berceaux, je le sais, pour toujours,
Penché de tout mon cœur, vous chantant des comptines,
Embrassant tendrement vos frimousses mutines,
Veillant sur vos sommeils et conjurant vos peurs.
C’est dans vos yeux si clairs, qui n’étaient pas trompeurs,
Dans vos rires sans fards, dans vos larmes sincères,
Et dans vos petits bras qui si fort m’enlacèrent,
Que j’ai appris enfin à m’offrir sans retour,
À donner sans calcul, à aimer sans détour.
Ce sont vos premiers pas, vos jolis babillages,
Vos questions et vos jeux, tous vos enfantillages,
Vos menottes blotties au creux de mes deux mains,
Qui m’ont donné le cœur de croire aux lendemains
Et la force d’aimer et rendu l’espérance !
Mais vous voilà partis aux quatre coins de France,
Pour vivre vos amours, exercer vos métiers,
Et je reste bien seul mais le cœur tout entier
Comblé de souvenirs, de joies et de tendresse,
Heureux de vos bonheurs, souffrant de vos détresses !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
7
Et quant à toi mon Dieu, mon cœur, bouleversé
Par ton immolation et par ton sang versé,
Ne trouve plus les mots, n’aspire qu’à se taire
Devant l’immensité de l’Amour Trinitaire !
Nos passions les plus vraies, je le sais désormais,
Ne sont que des soupirs, et les corps que j’aimais
Que des souffles légers, de piteux artifices,
Avant d’être sauvés par ton Saint Sacrifice.
Nos mots sont insensés, nos concepts impuissants,
Nos pensées étriquées et nos cœurs gémissants ;
Notre science se tait et la raison chancelle
Devant Toi qui créas de rien, d’une étincelle,
L’univers tout entier et tout le genre humain ;
Toi qui, à chaque instant, tiens blottis dans ta main,
Toutes les Galaxies, les trous-noirs, la lumière,
Depuis l’aube des temps et la saison première !
Toi qui nous as créés de toute éternité,
Toi seul sais nous aimer, Dieu plein d’aménité !
Tout amour vient de Toi, c’est en Toi que j’espère,
En ton fils Jésus-Christ qui fait de Toi mon Père !
Ô mon Dieu toi qui es, pour nous tous les humains,
Tout là-haut sur la croix, ouvrant tout grand tes mains,
Au nom du Sacré-Cœur et de tes plaies béantes,
Remplis de ton Amour nos âmes mécréantes !
© Jean-Pierre d’AIGREMONT
Membre de la Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques
Poème déposé à la SACD
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Jean-Pierre d’AIGREMONT
Peinture 50 x 65 cm
Collection particulière Fribourg Allemagne
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