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« La plus inquiétante jeunesse est celle qui n’a pas d’opinions extrêmes »
Comte de Chambord
L’œuvre Si le coup de force est possible est une collaboration entre trois écrivains de l’Action Française : Charles Maurras et Henri Dutrait-Crozon, pseudonyme de MM. Frédéric Delebecque et Georges Larpent. Une partie de cette œuvre reprend directement des articles qui ont été publiés dans l’Action Française. Durant une grosse soixantaine de pages, Maurras et ses acolytes vont démontrer la possibilité et la nécessité d’un coup de force, en s’appuyant bien évidement sur l’histoire, mais également en répondant aux principales critiques qu’ils subirent lors de la parution des articles.
Il est indéniable que la situation politique, sociale, et économique a énormément changé depuis 1910, néanmoins, il est intéressant de voir que ces développements, une fois actualisés, sont encore pleins de justesse.
Les auteurs de ce livre partent du principe que le « coup de force est légitime, puisqu’il brise un régime dont toutes les pensée tendent à tuer la patrie ». On retrouve ici, l’idée maurassienne de nationalisme intégral. De plus, ce même coup de force « est nécessaire, car il est impossible d’en finir autrement avec ce régime démocratique et républicain ». En effet, le système monarchique en lui-même ne peut s’obtenir via des élections de par sa nature. En outre, il est difficilement imaginable qu’un président, après avoir été élu, soit rappelle le roi à la tête de la France, soit propose un référendum populaire sur le retour de la monarchie. Quand bien même il choisirait cette dernière option, rien ne prouve à l’heure actuelle, que le peuple se tournerait vers la royauté. C’est ici un combat majeur mené par l’Action Française durant des années, à savoir celui d’immiscer dans les têtes du peuple l’idée même du roi et la possibilité du putsch.
S’appuyant sur les exemples de Monck en 1660 et Talleyrand en 1814, les auteurs décrivent ce qui s’apparente au summum de la prise de pouvoir. En cela l’opération du Français « fut si parfaite qu’elle mériterait à peine le nom de coup ». La prise du pouvoir par le haut a cela de particulier qu’elle nécessite d’avoir des sympathisants à des postes plus ou moins névralgiques du pays. Ce, afin d’être en position de faire pression ou de bloquer l’administration, et par conséquent d’obtenir la chute du gouvernement sans avoir à recourir à la force. Cependant, les auteurs admettent qu’une force armée — comme pour Monck — ajoute un levier psychologique et physique non négligeable. Aujourd’hui, la réacosphère est bien absente des arcanes du pouvoir français, et même si elle peut se targuer d’avoir des militaires très hauts-placés, des chefs d’entreprises ou des avocats, il serait difficile d’imaginer un instant pouvoir faire pression sur un gouvernement pour sa démission ou l’établissement d’un roi. D’autre part, ce genre de coup n’est possible que si une fraction — même non majoritaire — de l’opinion est en accord avec les idées proposées, dans le cas contraire, le néo-gouvernement ne pourrait réellement exercer son pouvoir.
Ce deuxième type de coup de force est qualifié par Maurras et ses confrères, de beaucoup plus probable. Pour ce genre de coup, il suffit d’avoir dans son camp le « le dépositaire d’une fraction quelconque de la force publique pendant une de ces journées d’ébullition et de tumulte ». En clair, il faut avoir — en sus d’une foule motivée — accès à un pouvoir quelconque et nécessaire au gouvernement. Et les auteurs font ici le lien avec l’armée : si celle-ci est guidée, elle est capable de se lever et de conduire un renversement. De même qu’ils soutiennent qu’une petite troupe déterminée, organisée, et surtout dirigée, est capable de passer bien des barrages pour arriver au pouvoir. Il suffit ici de prendre l’exemple du putsch d’Alger, durant lequel aucune résistance physique n’a été opposée aux militaires putschistes. Ils ajoutent également que celui qui arriverait à faire ce coup serait à même de rassembler l’opposition sous ses bannières, avant de faire basculer les indécis et les neutres dans son camp. Il faut se rendre à l’évidence, ce qu’ils prétendent ici est très éloigné de ce que nous connaissons aujourd’hui. À l’époque, les nationalistes représentaient une vraie force d’opposition, et il est plausible qu’ils auraient rejoint l’Action Française en cas de putsch réussi par cette dernière. Actuellement il est dur d’en penser autant. Imaginons que des royalistes parviennent à faire un coup d’état, il est invraisemblable que le seul parti d’opposition que compte notre pays ne les soutienne, ne serait-ce qu’un instant. Cela démontre bien la présence d’un réel système politique Français. Système qui s’est considérablement fermé en un siècle : il est devenu impossible d’évoquer un avenir politique qui ne soit pas républicain.
La citation suivante résume parfaitement les différences entre ces coups : « C’est avec un personnel de préfets accomplis et d’administrateurs parfaits qu’on tente le n°1. Des “partisans” un peu oseurs et casse-cou préféreront le n° 2 ». Néanmoins, dès la phrase suivante nos penseurs rappelleront que « l’on n’a pas à se guider sur l’esthétique ni à faire des choix de caprice et d’humeur. On choisit ce qui s’offre », id est que le coup repose avant tout sur des événements non prévisibles, et, par conséquent, qu’il faut prendre ce qui se présente. Enfin, ils s’attardent sur une liste non exhaustive des formes que peut prendre le second type de coup de force, « soit la mutinerie militaire ; soit une émeute populaire ; soit un complot proprement dit, ourdi par un petite nombre d’hommes […] » Revenons tout de suite sur les émeutes populaires. La Manif Pour Tous nous a démontré que la catho-réaco-sphère pouvait encore se mouvoir en masse pour la défense de la société. Cependant, de ce qui a pu être vu, ou entendu dans les discours, il est improbable que cette frange de la population soit capable de tenter quoi que ce soit qui dépasse réellement le cadre de la loi. Cependant, nous verrons que l’état d’esprit a beaucoup changé entre le début du XXe siècle et nos jours, et qu’il se pourrait qu’il change encore. Pour ce qui est de l’armée, la situation ne leur semble guère plus complexe : « le régime a tué l’esprit d’initiative et de décision dans cette force armée qu’il a chargé de sa défense ». Ils n’ont pas tort, loin s’en faut. Dans Le complexe de l’Autruche Pierre Servent défend exactement la même théorie. Ce qu’il appelle « l’esprit d’Iéna » — id est l’esprit d’initiative et de décision — serait mort avec Napoléon et aurait conduit l’armée Française aux trois défaites consécutives de 1870, 1914, et 1940. Quant au complot ourdi par un petit groupe, cette solution semble hasardeuse : en effet, le gouvernement ainsi formé n’aurait ni l’opinion, ni la légitimité pour l’appuyer, là encore, nous en parlerons par la suite.
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