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La Révolution française décortiquée par Philippe Pichot-Bravard

« Contrairement à ce qu’on a longtemps pensé, la Révolution n’a pas semé des petits cailloux blancs puis des petits cailloux noirs. Elle a semé des cailloux blancs renfermant des cailloux noirs : c’est dans l’ADN de la tabula rasa qu’est ainsi contenu le principe même de la modernité »
Philippe de Villiers

C’est le dogme intouchable de la République française : la Révolution de 1789. Cette sombre période est devenue un instrument de propagande au service du régime et de son idéologie.
Sa symbolique –bonnets phrygiens et arbres de la liberté – s’impose toujours à nous, jusque dans les manifestations d’opposition à la loi Taubira où l’on a cru bon de faire défiler de belles Mariannes arborant écharpe tricolore et Code civil.
Pis, l’idéologie de régénération de l’Homme, cette ambition inouïe et mortifère, ne s’est pas arrêtée à Thermidor. La Ve République demeure la fille de la Révolution et du contractualisme rousseauiste. Pour preuve, l’idéologie du genre, apparue dans nos écoles sous un gouvernement de centre-droit (nous oserons le qualificatif de « girondin ») et instrumentalisée par l’actuel Ministre de l’ Education, M. Peillon.

L’ouvrage qu’il manquait

Il n’aura pas échappé à l’homme de bon sens que cette Révolution est toujours d’actualité. Or, pour la pourfendre, il faut aux Français jeter un regard critique sur les fondements idéologiques du pouvoir en place.
C’est justement autour de ce thème que votre gazette organisait le 21 février dernier une conférence de haute volée autour d’un universitaire de renom : le Pr. Pichot-Bravard, docteur en droit et spécialiste des idées politiques et des institutions.
Ce n’est ni dans les manuels officiels, les ouvrage de propagande ou les documentaire de la télévision d’Etat que vous trouverez ces armes. Il manquait à l’Histoire de la Révolution française un ouvrage documenté, détaillé, précis et concis à la fois. Un regard sans concession sur l’enchainement idéologique et politique qui vit les promoteurs du bonheur du Peuple organiser le premier génocide légal de l’Histoire.
C’est à cette tâche que s’est attelé le Pr. Pichot-Bravard, auteur de

La Révolution française

consacrée à la genèse de l’Etat de droit en France sous l’Ancien Régime, Philippe Pichot-Bravard rappelle ce qu’était la France de l’Ancien droit : une Patrie charnelle où le Roi justicier, lié par le droit naturel, les lois fondamentales et conseillé par des sages, régnait sur ses peuples. Cette France, qui était avant tout une famille de familles, marquée par l’amitié politique et l’importance des corps intermédiaires et des libertés provinciales, a été attaquée par la funeste Révolution.

Drapés des oripeaux du triptyque Liberté-Egalité-Fraternité, les disciples des prétendues Lumières ont inversé l’ordre social. Ils ont détruit la vision classique et catholique de la légitimité, héritée des Anciens et de S. Thomas d’Aquin. Cette légitimité, jadis finalisée en vue du bien commun que devait garantir un monarque débiteur de justice et garant des libertés concrètes, a été détournée. Depuis 1789, la légitimité n’est plus assise sur le Bien commun vers lequel elle doit tendre, mais sur la puissance politique de représentants. La fameuse Déclaration des droits de l’Homme, dont la France légale se vante tant, est l’illustration de cette inversion du sens du droit et de la politique.

La Déclaration de 1789, en effet, est marquée par une tension entre les articles 2 et 6. L’article 2, d’inspiration jusnaturaliste, garantit «  la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme », « la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression ». L’article 6, lui, dispose que «  la loi est l’expression de la volonté générale ».
Fin juriste, M. Pichot-Bravard rappelle ici la contradiction entre ces deux articles : l’article 6, au mépris du droit naturel, déclare que la loi n’est pas ce ce qui est juste ou bon, mais ce qui sort de la bouche de la volonté générale, aussi injuste cette loi soit-elle. Cette volonté générale, d’ailleurs, est bien souvent accaparée par des représentants qui, aujourd’hui comme hier, ne sont que des politiciens issus des villes et manipulés par les sociétés de pensée. Déjà, l’écart entre pays légal et pays réel est perceptible.

Inversion du vocabulaire et guerre contre la Foi

Tandis que se poursuit l’œuvre révolutionnaire, le sens même des mots est instrumentalisé par ses thuriféraires à des fins idéologiques. Le lecteur attentif n’aura pas manqué de noter, à la page 81, cette citation du philosophe Jean-François de la Harpe : « le propre de la langue révolutionnaire est d’employer des mots connus, mais toujours en sens inverse  » [1]. Ainsi, le mot Peuple, dans la bouche des révolutionniares, ne désigne plus la population française, mais les partisans de la Révolution. Les autres sont des ennemis du Peuple.
Les années passent, et les guerres de l’Ouest, en 1793-94, apparaissent sous les yeux du lecteur. Au nom d’une vision rousseauiste du Contrat social, les Vendéens seront massacrés car exclus dudit Contrat républicain. S’ils ne contractent pas, ces ennemis du Peuple ne méritent point de vivre.
M. Pichot-Bravard s’attarde également sur les persécutions anti-religieuses, la Constitution civile du clergé (la dicture contre la Foi commence dès 1790) et l’établissement d’une nouvelle religion de l’Etre suprême. Là encore, l’actualité du propos frappe le lecteur : la religion laïque de nos gouvernants a pris racine il y a deux siècles. Après avoir évoqué la « dictature régénératrice » à l’œuvre en France, l’auteur analyse les turpitudes politiques qui ébranlèrent le pouvoir de Robespierre, et portèrent les Thermidoriens au pouvoir.

La Révolution n’est pas terminée

Enfin, M. Pichot-Bravard fait surgir devant nos yeux la postérité de la Révolution. Déclarée terminée par Bonaparte, elle a pourtant irrigué le Code Napoléon, base de notre droit civil, inspiré la IIIe République anticléricale ainsi que le totalitarisme bolshevik.
In fine, ce tableau chronologique donne une lumière particulière à notre XXIe siècle balbutiant, un siècle dominé par une « dictature du relativisme » dénoncée par notre bon pape Benoit XVI, et que nous n’avons pas fini de combattre.
Philippe Pichot-Bravard de conclure, citant Vincent Peillon : « La Révolution française n’est pas terminée ».
Eh bien ! La contre-révolution non plus.

La Révolution Française, Philippe Pichot-Bravard, éditions Via Romana.
24 euros.


[1in Du fanatisme dans la langue révolutionnaire ou du fanatisme, Jean-François de la Harpe (1797)

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