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C’est un grand risque pour tous ceux qui osent s’opposer au « mariage pour tous » que de se voir qualifié d’homophobe. Une telle sentence est terrible, car d’une part elle nous accuse d’un manque de charité, et d’autre part elle fausse le débat en nous situant d’emblée hors-jeu. Il nous faut donc montrer en quoi s’opposer au « mariage pour tous » n’est pas un acte homophobe, bien au contraire.
Nous pouvons comprendre le terme « homophobie » dans 2 sens principaux, qui certes sont intimement liés mais demandent à être abordés séparément afin de mieux discerner l’injustice d’une telle accusation.
Premièrement, l’homophobie est en tant que phobie une peur irraisonnée, une aversion vive et instinctive envers les personnes homosexuelles. Nous voyons ici que cette réaction est infondée parce qu’irrationnelle. Il s’agit d’une pulsion et donc d’une passion que nous subissons, toute peur étant subie et faisant partie du domaine du pâtir. L’homophobie n’est donc pas en ce sens un acte délibéré et choisi après un discernement rationnel. Or si nous revenons désormais à l’analyse du sujet auquel est appliqué ce prédicat « homophobe », nous avons affaire à des personnes s’opposant au « mariage pour tous » de façon rationnelle parce qu’appuyant leur discours sur des arguments. Il s’agit donc d’un combat d’idées réfléchi, confrontant les thèses, jugeant les arguments de chacun. Comme tous ceux qui s’opposent à cette loi le savent et peuvent en témoigner, une telle attitude demande un effort intellectuel sans cesse renouvelé, puisqu’il s’agit d’analyser chaque argument – aussi bien ceux que l’on attaque que ceux que l’on défend – afin de pouvoir juger de sa pertinence. Il est intéressant et surprenant de constater que même l’auteur de l’argument cité ci-dessus admet cette attitude rationnelle : « toute argumentation discutant la légitimité du mariage homo est fondamentalement l’expression d’un sentiment homophobe ». Ainsi, il ne peut s’agir de la part des opposants au « mariage pour tous » d’une attitude homophobe, puisque cela impliquerai une prédominance de la peur et donc des passions, et exclurait toute argumentation. Or nous avons bien au contraire affaire à des discours rationnels nourrissant un combat d’idées.
Deuxièmement, l’homophobie renvoie à une haine envers les personnes homosexuelles. C’est d’ailleurs ce sens qui est le plus souvent pris en compte dès lors que ce terme est employé. Il nous faut alors partir du terme « haine », qui signifie une privation d’amour. En toute logique, l’analyse de l’accusation portée contre les opposants au « mariage pour tous » doit donc nous mener à conclure qu’il y a ici manque d’amour envers les personnes homosexuelles. C’est alors le concept d’amour qui doit être à son tour approfondi. Nous parlons bien souvent de l’amour en restant dans une compréhension bien trop confuse de ce qu’il est, ce qui implique le risque d’y mettre ce que l’on veut et ce qui nous arrange. L’amour est certes très complexe à analyser tant il demeure en partie mystérieux, mais nous pouvons néanmoins affirmer qu’il s’agit dans l’amour (amitié tout autant qu’amour sponsal) de vouloir le bien de l’autre pour l’autre. Or le bien de l’autre ne peut être discerné que par une connaissance toujours plus approfondie de ce qu’est cet autre, afin de rechercher un bien qui lui convient. Ainsi, ce n’est pas manquer d’amour que de ne pas accorder à une personne un bien qui ne lui convient pas. Bien au contraire c’est aimer en vérité et donc être véritablement charitable, car c’est refuser de tromper l’autre et de le frustrer en lui présentant un bien non approprié qui entrainera des conséquences néfastes pour la personne elle-même. Or dans le cas des opposants au « mariage pour tous », les arguments avancés sont ceux d’une inadéquation entre la réalité des personnes homosexuelles et la réalité du mariage. Si le mariage leur est refusé, c’est parce qu’en raison de leur orientation sexuelle l’accès au mariage ne leur convient pas. Ce n’est donc pas pour les condamner ou les exclure, mais pour éviter de les engager dans une réalité qui sera pour eux une impasse. Or vouloir éviter de telles souffrances futures pour ces personnes est justement le signe d’un réel amour et d’une charité profonde, car il est véritablement une recherche de leur bien.
Pour ces deux raisons, nous pouvons affirmer que l’opposition au « mariage pour tous » n’est pas une attitude homophobe, puisqu’elle est au contraire une démarche réfléchie et profondément aimante.
Théophile
Cet article est également disponible à cette adresse : La Phronèsis.
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