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Et à Nantes, c’était ça : « Cours, Fourest, cours ! »

Photos : RdC
Témoignage de RdC, envoyé spécial du R&N à l’opération Hommen de Nantes. Lui même participant.

Le rendez-vous avait lieu aujourd’hui à 12h30 sous le pont des douves du château des ducs de Bretagne. Nous étions une bonne cinquantaine, gonflés à bloc. Vingt filles nous servaient des picnics et des bières. Puis nous avons répété notre chorégraphie, avant de recevoir sur nos bustes des slogans de rigueur. Première étape : la Place Royale, pour notre première action.

Place Royale : Nous parvenons à obtenir d’un orchestre, prétextant d’un happening, qu’il nous laisse 15 minutes. Là, l’un d’entre nous commença le discours, accompagné de 18 autres, torse nu. Nous interprétâmes une superbe variation sur gaz lacrimogène et menottage par des CRS de circonstance. Alors surgirent les Hommen, dispachés parmi les badauds, afin de libérer leurs frères des fers de l’injuste tyrannie. Nous étions 50, avec fumigènes et slogans. La foule nous applaudissait à tout rompre. On nous avertit alors que les flics arrivent. Nous filons nous rhabiller, direction la gare, pour accueillir mademoiselle Fourest. Arrivés, nous tombâmes nez à nez avec mademoiselle Fourest, qui nous filma avec son téléphone. Il était 15h. Suite de l’opération : le palais des congrès.

Arrivés au palais des congrès, nous avons chargé la police, et nous fûmes gazés pour la cause. Des amis de la manif nous donnent l’horaire du départ de mademoiselle Fourest. Courtois jusqu’au bout, ne pouvant laisser une demoiselle courir le risque d’être assaillie par des malfaisants, nous décidâmes de l’escorter jusqu’à son train. Elle monta sur le quai par un escalier dérobé, sous une large escorte policière. Nous fûmes rejoints par la manif pour tous, qui elle aussi avait accueilli mademoiselle Fourest au palais des congrès, et avait décidé de la saluer à la gare. Là, nous fûmes à nouveau gazés. Nous montâmes sur les voies, le TGV eut 50 minutes de retard. Les voyageurs n’étaient guère fâchés, et nous applaudissaient, hormis quelques fâcheux.

Témoignage de Crassus Detritus, envoyé spécial du R&N à la manifestation nantaise du 13 avril 2013.

Samedi 13 avril,

Nantes,

vers 16h, sous une pluie fine.

Devant le Palais des Congrès de Nantes

Nous sommes arrivés devant le palais des congrès de Nantes, et avons pu immédiatement rejoindre le foule, amicale et bruyante, qui se tient là pour protester contre le déni de démocratie que nous subissons depuis déjà plusieurs mois.

Tout y est : les drapeaux, les banderoles, les mariannes, les casseroles (très à la mode en ce moment, surtout au gouvernement), les cornes de brume, des sifflets, les sweats et surtout les gens : des jeunes, des moins jeunes - voire des vieux -, des familles, des célibataires.... et les CRS. Enfin, il manque le ministre Vallaud-Belkacem, mais l’essentiel est là : Caroline Fourest. Le but affiché était de lutter contre la culture de mort, plus particulièrement contre la loi inique du « mariage pour tous ».

Une dame nous dit que des gazages ont déjà eu lieu. En effet, nous venions de Vannes, assez tard il est vrai. Les Hommens étaient déjà entrés en action, et quelques heurts avaient eu lieu.

L’ambiance est bonne et les responsables de la sécurité de la Manif pour tous tiennent bien les manifestants. On est proche de l’ambiance du 13 janvier en ce milieu d’après-midi. La Marseillaise, les slogans, la musique, le bruit...

En revanche, et contrairement au 13 janvier, on devine les CRS tendus : ils n’ont pas de casques, mais des boucliers et des matraques bien visibles. On aperçoit un jeune trainé par les policiers vers un fourgon.

Soudain des jeunes s’agitent et courent vers une autre entrée, précédés d’une escouade de CRS. La foule accueille les quelques courageux qui ont pu s’infiltrer dans le bâtiment et mettre un peu d’ambiance dans la salle.
Poings et drapeaux brandis, sourires conquérants, tout y est.

L’accueil est triomphal.

Puis le mouvement se poursuit vers l’arrière du bâtiment. Quelques camions des forces de « l’ordre républicain » y sont gardés par trois CRS casqués, bombes de gaz à la main, ce qui crée une certaine ambiance...

Mais devant les barrières les CRS se révèlent très cordiaux, sympathiques et enclin à la blague.
« Et vous, vous en pensez quoi ?

  • J’ai pas d’avis.
  • Et après le service m’sieur ?
  • J’ai pas d’avis non plus » nous répond-il en souriant.

Ou encore : « je peux vous serrer la main ?

  • Pas en service, par contre après au bar, pas de problème »

Les manifestants entonnent un « Si t’es fier d’être CRS tape dans tes mains !! »
Je crois que leurs consignes interdisent de taper dans les mains, mais ils sourient.

Puis des gens commencent à sortir du palais des congrès, certains passent vite, d’autres prennent leurs temps. Il y a quelques doigts d’honneurs. Les manifestants, applaudissent ou huent, reprennent les slogans. « Hollande démission » et « une seule solution, la dissolution » reviennent régulièrement. La Marseillaise à nouveau.

Vers 17h00, le bruit court que mademoiselle Fourest rentrera sur Paris par le train, vers 17h50. Vingt minutes plus tard, avec un ami, je suis les groupes en direction de la gare de Nantes.

A la gare de Nantes

Nous retrouvons des jeunes, festifs et échauffés, bloqués dans le tunnel sous les voies par un cordon de CRS. Le quai n°2 est interdit d’accès. La tension monte, les voyageurs veulent passer, je les aide à accéder au cordon avec un responsable de LMPT. Un manifestant ne recule pas malgré la semonce d’un CRS, il se prend un léger coup de bouclier. Il démarre au quart de tour, la matraque joue son rôle : tout le monde recule, mais pas de gazage à l’intérieur. Un adulte prend à parti le jeune et le calme pendant que les CRS se reprennent. Deux bidasses du plan vigipirate jettent un coup d’œil avant de repartir à leur patrouille.

Soudain, les CRS s’écartent et s’en vont en longeant le mur : tout le monde se retrouve devant l’accès au quai dans une explosion de joie triomphale et exubérante. Genre : "on a gagné quoi..."

Nous nous précipitons sur le quai afin d’apercevoir mademoiselle Fourest, avec la foule. Il y a à présent majoritairement des jeunes gens, entre vingt et trente-cinq ans.

Le train part dans 2 minutes, la rumeur court : « Elle arrive là bas !! ».
Au bout du quai, une entrée fermée au public : deux CRS, tout équipés, en sortent et la dégagent de la grille qui l’obstruait ainsi que de ses manifestants. Une jeune fille se précipite sur la grille pour la refermer. Le reste de la cohorte sort sans aucune difficulté, et devant l’afflux de manifestants gazent sans sommations. Je recule, pris légèrement par le gaz, et m’éloigne pour cracher et respirer. N’ayant pu monter à Paris le 24 mars, je découvre la méthode Manuel Valls à Nantes. Je suis choqué. J’y retourne, les CRS en ont profité pour reformer la ligne, et gazent encore, à tout va. Là j’ai mal, j’ai voulu me joindre aux cris, j’ai trop inhalé de gaz, et vive l’apprentissage par l’expérience !

Je plains les CRS. Je le leur crie, donc j’aspire du gaz et je m’y expose... le bon (avec un « c »)...

On aperçoit des policiers en civil, badge à l’air. En reculant, je me retrouve entre deux employées de la SNCF, assises et en larmes, gazées en service au nom de « l’ordre républicain », et un commandant CRS, en train d’essuyer des larmes de ses yeux, victime du gazage collectif.

J’ai remarqué une autre fois ce commandant, complètement isolé au milieu des manifestants, à organiser sa troupe par talkie-walkie. Pris à parti, il aurait été « neutralisé » très facilement je pense... heureusement que nous ne sommes pas à la CGT !

Une femme tamponne à l’eau les yeux des gens qui reculent, aveuglés par la douleur et les larmes, le visage rouge et crispé.

Des cris, un brouhaha continu...
Les CRS sont méconnaissables, tous casqués, matraques et boucliers sortis ou avec une bombe de gaz à la main.

A l’avant du train le quai est quasiment vide, et après un instant de flottement, des manifestants descendent sur la voie.
Je les rejoins. Levant la tête, je laisse la pluie, trop fine à mon goût, calmer la douleur de mes yeux. J’aperçois le contrôleur, il alerte la sécurité et ses collègues que la voie est occupée.

Il commence alors un va-et-vient sur la voie, entre les CRS et les manifestants. Certains ont enlevé leurs T-shirts. Leurs torses abordent des slogans contre les gaz, du genre "Gaz no more". Les Hommen sont de retour !

Un exemple : les CRS occupent le bord du quai et font face à une moitié des manifestants, le reste étant sur la voie. Ils se retournent pour descendre virer les occupants, qui détalent plus ou moins vite sur le quai d’en face. Les CRS sont immédiatement suivis par les manifestants du quai, à qui ils tournent le dos. Je suis éberlué : tous les CRS nous tournent le dos... ils ont sûrement saisi que les manifestants ne sont ni violents, ni dangereux. Peut-être un peu exaspérants, car exaspérés !

Cris, slogans, courses, flou, va-et-vient...

Soudain tous les CRS se retirent en ordre sur les deux quais, le voie est à nouveau pleine de manifestant qui chantent et qui crient des slogans. A nouveau un sentiment de victoire éphémère. Je salue un ami, Hommen notoire, sur la voie. Puis c’est en corps constitué que la troupe revient, pour poursuivre les dangereux et impudiques hommens ou assimilés qui courent le long de la voie.

Un jeune saisit la caillasse du ballast pour la lancer sur les forces de l’ordre, dans leurs dos (une fois n’est pas coutume, mais ça commence à faire beaucoup : les CRS sont entourés de manifestants, donc dos à certains, la non-violence assumée du mouvement facilite la tâche). Il est immédiatement arrêté par d’autres manifestants : les violences physiques sont toujours du fait des forces de l’ordre, mis à part quelques dangereux flambis lancés par les manifestants, ruisselant en colonnes immondes sur ces armures qui jadis faisaient la fierté de leurs porteurs.

Finalement, vers 18h20, la voie est à peu près dégagée. La tension est électrique mais le calme est revenu. La voie est réoccupée, les manifestants sont dos au train. A 18h25 je dois m’éclipser avec mon camarade. Les CRS sont en ligne continue, sur la voie et le quai n°2. Ils commencent à s’avancer...

En partant nous croisons deux CRS, portant deux ou trois de bombes de gaz chacun, ils courent manifestement pour rejoindre et ravitailler leurs camarades.

A la sortie de gare il y a une voiture bleue gendarme, mais banalisée, immatriculée 599 BRD 44 remplie de policiers en uniformes derrière une voiture de la police nationale.

Allez, c’est l’heure de rentrer, la route est longue jusqu’à Sainte Anne d’Auray, mais ça valait le coup.

Je ne suis ni communiste, plus républicain, ni espagnol, mais j’ai envie de monter crier à Paris le 5 mai « No Pasaran !! »

Crassus Detritus

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