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Son Éminence André, cardinal Vingt-Trois, s’est prononcé sur twitter contre la quenelle avec une grande véhémence (sept gazouillis sur les quatre-vingt-deux qu’il a émis), en condamnant par la même occasion les profanations exécutées par Femen. Si l’on peut regretter sa volubilité excessive, au regard de la trivialité de l’affaire Dieudonné, certains de ses arguments sont nouveaux et méritent d’être écoutés avec déférence.
Ainsi, contre « une vision libérale de la morale », le cardinal Vingt-Trois explique : « On ne doit pas laisser se développer et se banaliser les caricatures, la dérision, la provocation. Ces provocations sont le symptôme d’une société dans laquelle on ne tient plus les seuils de protection, protection de l’identité propre de chacun. »
À force de défendre la liberté d’expression à l’envi et à tout crin, nous pourrions certes perdre de vue les limites dont chaque société a besoin (même si elles sont inévitablement floues, voire arbitraires à la frontière). Cette « décence commune » devrait se passer de loi. Pour quiconque a été élevé, en particulier dans la foi catholique, s’exprimer ne va pas sans respect, pour soi par la pudeur, pour les autres par l’attention. La croissance générale de la dérision, de la caricature et de la provocation n’est pas un progrès, mais un symptôme. Quand l’un ou autre ne reste pas à sa place et outrepasse ces règles, il fait sauter des murs qui protégeaient nos relations communes (ce qu’il est convenu d’appeler — à tort — le pacte social ou le vivre-ensemble). L’État se sent alors obligé d’agir et de légiférer : cela n’est dans l’intérêt de personne dans une époque si légaliste.
Mon article n’est en aucun cas une attaque en règle de la quenelle : si cette dernière est éminemment vulgaire, elle est bien moins instrumentalisée à fins d’oppositions raciales ou religieuses par ses promoteurs que par ses détracteurs (son caractère antisémite, dénoncé par le cardinal Vingt-Trois était vraiment très douteux, avant que ne la presse ne s’en mêle). Plus profondément, si le cardinal Vingt-Trois se trompe probablement de phénomène (ce qui ne peut lui être sérieusement reproché, tant la pression médiatique est forte), il n’en pas moins trouvé le véritable nom de la prolifération des « incivilités » oratoires ou gestuelles.
Addendum 19h
Suite aux réactions nombreuses qui ont suivi cet article, je vous invite, chers lecteurs, à voir au-delà du bout de votre quenelle. La fureur avec laquelle vous avez défendu ou condamné ce geste dérisoire est même inquiétante. Certains d’entre vous gagneraient à protéger notre Église, ou nos églises, avec la même vivacité. Si les premiers mots de l’archevêque de Paris sont peut-être regrettables, son argumentation se déploie au-delà de ces réactions épidermiques. C’était là l’objet de cet article, et votre serviteur ne prendra pas le temps de commenter le geste de Dieudonné. « De minimis non curat praetor », rappelait avec justesse un ecclésiastique en commentaire (sur notre page facebook).
Le prince de l’Église déplore plus profondément, donc, une société dans laquelle la dérision, la caricature et la provocation sont érigées en forme ultime de la liberté d’expression.
C’est faire bien peu d’honneur à la liberté.
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